En 2008 est fondée la Fondation Palazzetto Bru Zane, mais elle est vraiment en ordre de marche en 2009, alors que le palazzetto vénitien qui l’abrite est justement inauguré. Le but de cette fondation est de travailler à la mise en valeur de tout un patrimoine de la musique française : ce romantisme peu connu qui fit pourtant courir toute l’Europe à Paris au XIXème siècle. Si l’époque baroque a le Centre Musical Baroque de Versailles pour effectuer un travail sur les sources et les partitions, permettant de remonter de nombreux ouvrages rares ou de redonner vie à des ouvrages trop souvent entendus déformés leur visage d’origine, il restait un grand vide pour toute la musique qui suivait. Alors que nous avions des éditions critiques pour des opéras de Rossini par exemple, rien de comparable en France en dehors de quelques recherches sur des titres comme Les Contes d’Hoffmann ou Les Pêcheurs de Perles et plus récemment les opéras de Meyerbeer. Le travail est donc énorme ! Car à côté de ces compositeurs connus qu’il faut réussir à remettre à leur juste place après des décennies de dénigrement, il y avait aussi la mise en lumière de grandes raretés du romantisme… et le chaînon manquant entre le baroque et Berlioz, tous ces compositeurs qui depuis Gluck n’étaient que de vagues noms comme si on était passé de la musique de Louis XVI au début du romantisme. Alors bien sûr, il n’y a pas que l’opéra dans cette mission et nous aurons aussi un splendide travail sur les mélodies, sur les pièces orchestrales, sur les cantates du Prix de Rome… mais ce qui nous intéresse ce soir, c’est avant tout l’opéra car c’est lui qui est célébré sous toutes ses formes pour ce Gala qui fête les dix ans de la fondation. Dix ans de magnifiques découvertes et de mise à disposition de documents de référence, qu’ils soient discographiques ou écrits… aidant même à la production de spectacles scéniques. Continuer…
Epoque Romantique
Parsifal, une équipe russe à la Philharmonie de Paris pour un Wagner splendide!
En 2018, Valery Gergiev et sa troupe étaient venus pour nous proposer un Ring sur deux week–end. Les quatre concerts étaient impressionnant de qualité avec des chanteurs inconnus pour la plupart mais qui avaient donné des prestations mémorables. Après une grandiose Iolanta la veille, voici donc Parsifal pour terminer ce week-end. Après le russe, nous revenons à Wagner. Gergiev connaît bien cet ouvrage pour l’avoir dirigé de nombreuses fois et même pour l’avoir enregistré avec son orchestre du Mariinsky en 2009. Même après avoir fait ses débuts au Festival de Bayreuth cette année, il reste un chef wagnérien regardé avec méfiance par les puristes pour des lectures parfois manquant de tenue ou d’énergie. Mais on sait que le chef est capable du meilleur lorsqu’il est inspiré, surtout avec un orchestre qu’il a façonné et qui lui répond au doigt et à l’œil. Dans la distribution nous retrouvions Mikhail Vekua qui avait été Logue, Siegmund et les deux Siegfried… mais aussi Yuri Vorobiev qui avait donné vie au Wotan de L’Or du Rhin… et bien sûr Evgeny Nikitin ! Parmi les petits rôles, on notera la présence d’Yekaterina Sergeyeva qui avait eu de nombreux rôles lors du Ring (Flosshilde, Fricka et la Première Norne). La grande question portait donc principalement sur la Kundry de Yulia Matochkina totalement inconnue malgré des retours très favorables de sa récente participation à un Roméo et Juliette de Berlioz… Continuer…
Étincelante Iolanta par le Mariinsky
En 1892, Piotr Ilitch Tchaïkovsky proposait son dernier opéra couplé avec son dernier ballet : Iolanta et Casse-Noisette. Bien que les deux ouvrages aient été de nouveaux réunis il y a quelques années à l’Opéra National de Paris dans une production signée Dmitri Tcherniakov, il est tout de même rare de les retrouver ensemble. Avec son heure et demi, Iolanta pose un souci aux programmateurs : trop court pour être seul dans une soirée, il demande de trouver un autre opéra court qui pourrait compléter le spectacle. En juin 2018, l’Opéra de Tours avait osé lui adjoindre Mozart et Salieri de Rimsky-Korsakov, opéra encore plus rare sur nos terres occidentales. Mais tout de même, au moins au concert, cet ouvrage de Tchaïkovsky semble revenir dans les salles et montrer que Tchaïkovsky n’est pas le compositeur de deux opéras. Peut-être la tournée d’Anna Netrebko en 2012 a permis de faire connaître cette partition magnifique car il semble être repris plus souvent depuis quelques années et c’est un vrai plaisir tant la musique y est sublime. Et cela nous change des éternels Eugen Onegin et La Dame de Pique (même si ces deux ouvrages sont passionnants aussi!). Pour sa venue maintenant annuelle avec sa troupe du Mariinsky, Valery Gergiev nous offre la possibilité de ré-entendre dans de superbes conditions ce Iolanta. Continuer…
Jeune et brillante génération pour La Forza del Destino à Bastille!
Étrangement, alors que la partition de La Forza del Destino fait sans doute partie des plus belles de Giuseppe Verdi, elle n’a pas beaucoup été représentée à Paris ces dernières décennies. Entre 1981 et 2011, aucune représentation à l’Opéra National de Paris. Bien sûr, la production de 1975 a vu passer des grands noms comme Martina Arroyo, Piero Cappuccilli, Nicolai Ghiaurov, Martti Talvela, Kurt Moll, Fiorenza Cossotto, Placido Domingo… mais pourquoi ces trente ans d’interruption ? Peut-être est-ce dû à son argument assez redoutable tant pour le spectateur que pour le metteur en scène. Peut-être que la volonté de montrer un théâtre de plus en plus complexe et « humain » n’a pas aidé l’ouvrage à revenir sur la scène parisienne. Toujours est-il qu’en 2011, sous l’impulsion de Nicolas Joël alors directeur de l’institution, une nouvelle production est montée par Jean-Claude Auvray avec des grands noms : Marcelo Alvarez et Violetta Urmana, entourés de seconds rôles de haut niveau. Hélas, les petits problèmes de santé du ténor et le manque d’implication de la soprano (qui a toujours été beaucoup plus convaincante en mezzo-soprano) avaient légèrement gâché la fête. Pour cette reprise, c’était avant tout Anja Harteros qui attirait le public… mais en deuxième distribution se trouvait la jeune Elena Stikhina, toute joyaux découvert dans Wagner et qui avait remplacé il y a peu Sonya Yoncheva dans Tosca sur cette même scène de Bastille. Continuer…
Manon à l’Opéra-Comique : Petibon, Minkowski et Py au service de Massenet
En 1990, la Manon de Massenet était montée pour la dernière fois sur les planches de la Salle Favart. Alors que c’est le deuxième opéra le plus joué de l’histoire du théâtre, alors que sa statue salue l’arrivée des spectateurs aux côtés de Carmen, alors que le plafond de la salle lui rend hommage… il aura fallu presque trente ans pour que l’on retrouve enfin cette héroïne de Massenet. À l’époque, c’était Leontina Vaduva qui émouvait le public… en cette année 2019 ce sera Patricia Petibon. Bien sûr, il était possible entre temps de voir Manon sur les scènes de l’Opéra de Paris : en 1997 était créée une production de Gilbert Deflo où ont triomphés Renée Fleming, Richard Leech, Leontina Vaduva (encore !), l’étoile filante Alexia Cousin, Roberto Alagna, Rolando Villazon, Marcello Alvarez… pour ne rester que dans les deux rôles principaux. Et puis il est difficile d’oublier la sinistre production de Coline Serreau en 2012, qui devait être la participation de l’Opéra de Paris à l’année du centenaire de la mort de Jules Massenet. Mais entre une mise en scène inintéressante qui ne prenait jamais l’ouvrage au sérieux et une Natalie Dessay en grande difficulté… le souvenir n’est pas fameux ! Ici, c’est toute auréolée des triomphes de Genève (avec Petibon) et Bordeaux (avec Minkowski) que nous arrive la production d’Olivier Py, avec une distribution des plus alléchantes ! Continuer…
Turandot à Marseille : Petite scène mais grands formats vocaux!
Durant l’été 2012, les Chorégies d’Orange montaient Turandot mis en scène par Charles Roubaud. Sept ans plus tard, voici que la production a été remise à la taille de la scène de l’Opéra de Marseille pour le plaisir du public. Mais il faut bien avouer que le rendu est un peu décevant par moments quand on a vu la production originale. Et il est tout de même dommage que la direction ne puisse pas demander à un metteur en scène un travail un peu plus important que juste réduire sa mise en scène. Mais malgré tout, le rendu reste de bonne facture et surtout, cela permet d’écouter la partition de Puccini avec une distribution de haut niveau. Car nous avons ici une soprano wagnérienne qui commence à aborder les rôles de soprano dramatique, un ténor italien au timbre solaire… et la soprano délicate pour Liu. Bien sûr, nous n’avons pas ici les grands noms qui pourraient faire hurler les foules, mais la salle est tout de même très pleine pour cette dernière de la série. Continuer…
Le Postillon de retour à l’Opéra-Comique sous la voix de Michael Spyres
En 1836, Adolphe Adam est déjà connu de la scène parisienne, mais il n’a pas encore donné deux de ses plus grands chefs d’œuvres. Le Chalet est resté dans les mémoires, mais ce sera Le Postillon de Lonjumeau qui sera son véritable triomphe justement en 1836 sur la scène de l’Opéra-Comique, avant que sa Gisèle à l’Opéra ne donne un nouveau souffle au grand ballet français. Même encore aujourd’hui, le ballet est régulièrement donné et si il est beaucoup plus rare de voir Le Postillon, sa ronde est restée célèbre ! Avec son intrigue très marquée par l’opéra-comique mais son chant demandant une technique à toute épreuve, reprendre cet ouvrage n’est pas une mince affaire : il faut trouver des chanteurs aussi à l’aise avec les dialogues parlés qu’avec une écriture très virtuose, mais aussi un metteur en scène capable de retrouver ce ton spécifique de l’époque. Si en Allemagne la partition restera longtemps dans le répertoire par l’interprétation de quelques ténors forts connus, l’ouvrage sombrera malheureusement dans l’ombre à Paris. La preuve, il ne montera jamais sur les planches de la nouvelle salle Favart, pourtant construite en 1898. En 1936, une parade à Lonjumeau avec les forces de l’Opéra-Comique célébrera la partition d’Adam, mais point de reprise. C’est dire si le retour de ce monstre sacré est une évènement. Et les forces convoquées sont parfaitement à la hauteur de l’évènement ! Continuer…
Bartók à Paris, entre chant traditionnel et opéra
Pour un week-end, Iván Fischer devait présenter la musique hongroise et particulièrement celle de Béla Bartók. Grand compositeur de son pays, le premier concert était dévolu au chant choral et aux grandes partitions orchestrales (Le Mandarin Merveilleux et le Concerto pour orchestre) alors que le deuxième plongeait dans la musique populaire et l’opéra. Dans les deux cas, les concerts proposés par le chef étaient construits afin de pouvoir associer et faire se répondre la musique traditionnelle qui a inspiré Béla Bartók pour donner naissance à des partitions très complexes. Le but est de montrer d’où vient cette musique et d’en faire surgir les racines. Malheureusement, Iván Fischer n’a pas pu assurer ces concerts du fait d’un souci de santé. C’est donc son assistant Gábor Káli qui dirige ces deux concerts parisiens, faisant ainsi ses débuts à Paris et ayant l’honneur de diriger le fabuleux Budapest Festival Orchestra. Dans ce concert du dimanche, la première partie était réservée à la musique traditionnelle (qu’elle soit recomposée ou non par Bartók) avant que nous ne puissions entendre le seul opéra de Bartók : Le Château de Barbe-Bleue, ou A kékszakállú herceg vára en hongrois ! Continuer…
Un Requiem de Verdi à grands effets à la Philharmonie de Paris
Il y a tout juste trois ans, Gianandrea Noseda avait bouleversé le public de la Philharmonie de Paris avec un Requiem de Verdi impressionnant de profondeur et de passion. Il pouvait compter sur des chanteurs habités et les forces de l’Orchestre de Paris et de son ChÅ“ur. Les murs de la salle avaient alors résonné comme rarement ! Depuis, d’autres sont venus comme Riccardo Chailly avec la Scala par exemple. Forcément, le nom de Teodor Currentzis avec son ensemble MusicAeterna semble étrange après ces grands spécialistes du répertoire verdien ! D’autant plus que les chanteurs sont globalement inconnus à l’exception de René Barbera étant donné que Varduhi Abrahamyan remplace Hermine May initialement programmée. Habitué des lectures radicales du chef avec son orchestre jouant sur instruments d’époques et souvent en s’inspirant des pratiques plus baroques que romantiques, l’attente était grande. En effet, on ne savait si l’on allait assister à une véritable révélation ou au contraire à une chose plus qu’étrange. Le chef avait donné par exemple à l’Opéra Bastille des Don Carlo et Macbeth bien peu convaincants mais depuis il a montré qu’il pouvait donner des choses impressionnantes dans le répertoire romantique avec son ensemble. Soirée qui ne devait donc a priori pas laisser indifférent ! Continuer…