Faust, le premier grand triomphe de Gounod!

Malgré les succès d’estime, le nom de Gounod n’est pas encore sur toutes les lèvres à Paris et le compositeur a bien du mal à vivre de sa musique. Mais les choses vont changer avec quelques rencontres et surtout le fameux Faust qui reste son ouvrage le plus connu actuellement. Tellement connu qu’il a subi les affres des coupures, et modifications au fil des ans… et qu’il est encore rare de pouvoir le voir sur scène dans une version complète ou du moins historiquement informée. Bien sûr, sa discographie est pléthorique contrairement aux autres opéras précédemment comparés ici… Il y a de très nombreux enregistrements studios depuis les tous débuts de l’enregistrement audio. Ainsi, le premier enregistrement intégral date de 1908 dans une version allemande. Puis viendra la version dirigée par François Ruhlmann enregistrée en 1911-1912… et par la suite les versions seront toujours nombreuses et dans différentes langues, preuve de la notoriété de l’ouvrage : en italien en 1918 (direction Carlo Sabajno), en anglais en 1929 (dirigé par Sir Thomas Beecham qui enregistrera par la suite une version en français), en russe en 1947 (dirigé par Vassili Nebolsin avec les magnifiques Mark Reizen et Ivan Kozlovsky) ou encore en hongrois en 1973 (dirigé par Ervin Lukács). Mais les versions françaises seront aussi nombreuses et de référence : 1930 par Henri Büsser (avec rien de moins que Marcel Journet!), 1947 pour la deuxième version de Sir Thomas Beecham, 1953 et 1958 pour André Cluytens, 1963 pour Gianfranco Rivoli, 1966 pour Richard Bonynge, 1976 pour Alain Lombard, 1978 avec George Prêtre, 1986 ce sera Sir Colin Davis, 1991 Michel Plasson, 1993 Carlo Rizzi ou encore 2018 pour Christophe Rousset. Et ce ne sont là que les versions enregistrées en studio! Il faudrait ajouter les nombreuses captation sur le vif qui sont parfois passionnantes! Impossible donc ici de faire une critique complète de tous ces enregistrements. Un choix totalement partial sera donc fait, avec juste un petit mot sur certains enregistrements importants mais une description plus détaillée pour certains! Continuer…

Roméo et Juliette de Gounod sauvé par Perrine Madoeuf et Pene Pati à l’Opéra-Comique.

C’était sans doute le spectacle le plus attendu en cette période de Noël. Depuis quelques années, l’Opéra-Comique propose un opéra français en fin d’année… souvent rare, parfois juste peu monté. C’est le cas de ce Roméo et Juliette de Gounod qui n’avait pas connu les honneurs d’être représenté en version scénique à Paris depuis les mythiques représentations de 1994 qui réunissaient Roberto Alagna, Nuccia Focile et Michel Plasson. J’avais eu la chance à l’époque d’être présent en salle, mais n’ayant que onze ans, les souvenirs sont assez flous. Mais il y avait tout de même une certaine émotion de revenir dans la Salle Favart vingt-sept ans après. Et les émotions étaient aussi dûes aux circonstances. Alors que toutes les répétitions s’étaient bien passées, voilà que le jour de la répétition générale, le ténor Jean-François Borras qui devait chanter Roméo est testé positif au COVID 19… Il est alors remplacé au pied levé par Sébastien Guèze alors que le metteur en scène joue le personnage. Puis la veille de la première, c’est Julie Fuchs qui est elle aussi testée positive. Il faut donc trouver non pas un mais deux chanteurs pour reprendre ce couple maudit. Nous arrivent alors Perrine Madoeuf et Pene Pati pour prendre la relève en quelques heures pour une première triomphale. Durant la journée entre les deux représentations, nul doute que le travail scénique de ces deux artistes a dû être intense vu la qualité proposée. Mais c’était donc non seulement des retrouvailles mais aussi un spectacle miraculeusement sauvé! Continuer…

Bayreuth délocalisé à Paris pour une soirée!

Quelle surprise lors de l’ouverture du programme de la première partie de la saison de la Philharmonie de Paris que de voir une soirée donnée par l’orchestre du Festival de Bayreuth! Cet ensemble composé de musiciens faisant partie des meilleurs orchestres d’Europe ne joue habituellement jamais en dehors du cadre du Festival. Et même là il est très très rare de le voir sur scène, étant avant tout un orchestre de fosse, et même de fosse couverte vu la spécificité du Festspielhaus. Avec les jauges réduites lors de l’ouverture des réservations, difficile d’avoir une place ou du moins une bonne place. Il y a quelques semaines, devant l’amélioration des conditions sanitaires, la jauge a pu être supprimée et de nombreuses (très bonnes) places ont pu ainsi ravir ceux qui n’avaient pas réussi à prendre des places auparavant (mais sans pour autant faire bénéficier de meilleures places à ceux qui avaient réussi!). C’est donc dans une salle quasi pleine et avec des musiciens non masqués que se déroule ce concert, presque dans des conditions habituelles n’étaient les masques du public. Continuer…

Dans les Jardins de William Christie 2021 : dixième anniversaire.

La tradition avait été rompue l’année dernière vu les conditions de déroulement du festival (pas de déambulation, une structure beaucoup plus stricte dans les placements…). À l’époque, la peur était de ne pas retrouver cette ambiance, d’avoir un festival moins festif et bucolique. Mais en 2021, tout est revenu à la normale et me revoici donc dans les Jardins de William Christie! Beaucoup de programmes cette année encore avec des artistes renommés qui continuent toujours à venir tous les étés. On pourrait même penser que l’on assiste à une sorte de renaissance des Arts Florissants quand on voit combien de jeunes musiciens comme Thomas Dunford, Théotime Langlois de Swarte, Myriam Rignol ou encore Lea Desandre sont toujours fidèles au rendez-vous et semblent s’impliquer toujours plus dans les programmes des promenades musicales. Mais les fondamentaux restent bien présents : William Christie reste le maître même s’il partage de plus en plus la baguette avec Paul Agnew. Ainsi le concert du soir sera dirigé par l’ancien haute-contre (The Indian Queen de Purcell} alors que le chef historique jouera un concert pour deux clavecins avec Justin Taylor (là encore un autre jeune musicien de très haut niveau qui vient s’associer à cette manifestation!) à l’église de Thiré. Continuer…

L’incroyable Coq d’Or par Barry Kosky au Festival d’Aix-en-Provence

Il est rare de pouvoir assister en France à un opéra de Rimsky-Korsakov. L’opéra russe n’est que peu représenté et toujours avec les mêmes quelques ouvrages : Eugen Onegin, Boris Godounov et éventuellement Khovanshchina ou La Dame de Pique. Donc principalement Tchaikovsky ou Moussorgsky. Aussi, lorsque l’année dernière avait été annoncé le programme du Festival d’Aix-en-Provence, la joie était grande. Puis il a été annulé. La production a finalement pu être créée à Lyon ce printemps mais dans des conditions difficiles… et enfin le Coq va pouvoir lancer ses cris dans la cour de l’Archevêché! Ouvrage étrange et complexe, dernier opéra d’un compositeur versatile et passionnant, Le Coq d’Or bénéficie de plus de la mise en scène de Barry Kosky, artiste débordant d’imagination à qui l’on doit quelques grandes productions comme par exemple la Flûte Enchantée vue à l’Opéra-Comique. Les échos des représentations à Lyon étaient très bons et en effet, l’ovation qui salue la fin du spectacle a montré combien le public a été séduit non seulement par la mise en scène, mais aussi par l’œuvre en elle-même ainsi que par la distribution! Continuer…

Le Cygne Noir : Monteverdi et ses contemporains au Festival d’Aix-en-Provence

Le Festival d’Aix-en-Provence est renommé pour Mozart et les créations, mais aussi depuis quelques années par des productions d’ouvrages romantiques de prestige comme Tristan und Isolde pour 2021. Mais l’ADN du festival est aussi porteur de gènes baroques bien sûr, qu’ils soient italiens ou français. Après l’annulation malheureuse de tout le Festival l’année dernière et en particulier de L’Incoronazione di Poppea, voici un spectacle entièrement dévolu au baroque et même on pourrait dire au premier baroque italien tant il est centré sur Monteverdi, ses contemporains et ses descendants directs. Pas d’ouvrage complet mais une sorte de pasticcio avec comme pièce centrale le fameux Combatimento di Tancredi e Clorinda de Monteverdi. Et pour nous faire entendre des ouvrages souvent rares, un grand habitué des résurrections a été convoqué en la personne de Sébastien Daucé accompagné de son Ensemble Correspondance. Le choix du Théâtre du Jeu de Paume est aussi une excellente idée tant le cadre permet de profiter de tous les détails, mais aussi d’être proche de la scène où Silvia Costa a concocté un spectacle assez étrange. Continuer…

Quand La Belle Hélène oublie son caractère de farce voulu par Offenbach

Lorsque l’on parle d’Offenbach, on pense forcément à sa Belle Hélène. De par son sujet et sa musique, la partition a immédiatement su convaincre et attirer de nombreux spectateurs. Il faut dire que le compositeur a proposé bon nombre de trouvailles plus loufoques les unes que les autres tout en sachant aussi ménager des moments tendres et délicats. L’Opéra-Comique devait monter la production de Michel Fau en début d’année, mais malheureusement les conditions sanitaires ont fait que le spectacle a été annulé et remplacé par un grinçant “Gala pour salle vide” où se mêlent rire et sourire amer. Mais là, le public se déplaçait pour un concert joyeux, plein d’airs et d’ensemble aussi fantasques que joyeux. Quelques jours avant la représentation, une note est arrivée sur le site du Théâtre des Champs-Élysées indiquant que le livret avait été “mis à jour” par Lionel Rougerie. Mais bon, rien ne pourra jamais gâcher la joyeuse farce qu’est La Belle Hélène. Et avec en tête d’affiche Cyrille Dubois et Gaëlle Arquez, comment résister. Sauf que… Continuer…

La Fille de Madame Angot, surprise et bonne humeur au TCE!

Charles Lecocq n’est pas un inconnu des mélomanes et parmi ses ouvrages, bien sûr la plus connue reste cette Fille de Madame Angot. Enregistré avec Mady Mesplé dans le rôle titre, régulièrement repris au vingtième siècle, l’œuvre reste connue au moins de nom sinon musicalement. Car j’avoue humblement qu’à l’origine cet ouvrage ne me disait trop rien, ne m’attirait pas forcément malgré la distribution étincelante. Et puis le même jour, l’orchestre du Metropolitan Opera de New-York devait venir à la Philharmonie pour un programme Wagner. Annulation aidant, voilà que je finis par prendre une place. Après tout, ça ne peut pas être une mauvaise soirée. Et quelle surprise! Non pas une bonne soirée, mais une soirée magnifique. La partition, l’orchestre et les solistes, tout cela réuni pour un opéra-comique léger, plein de verve et de rebondissement. Depuis quelques temps le Palazzetto Bru Zane nous fait découvrir ces partitions un petit peu à la marge, parfois opérettes ou comédies musicales du début du vingtième. Mais ici nous avons un véritable opéra-comique qui charme et enchante l’oreille. Continuer…

Deuxième dose de Saint-Saëns, version Les Siècles à la Philharmonie!

Une semaine après le superbe concert dirigé par Tugan Sokhiev, de nouveau un programme entier dévolu à Camille Saint-Saëns à la Philharmonie de Paris ! Abondance de biens ne nuit pas bien sûr, d’autant plus que les programmes sont à l’opposé. Après un programme sans grande rareté (en dehors de l’ouverture), voici des pièces beaucoup moins données ! Les quatre poèmes symphoniques déjà, mais à cela s’ajoutent quelques pièces pour violon ou piano et un petit morceau de ballet extrait d’un opéra. Bien sûr, tout le monde connait une version ou l’autre de la Danse Macabre, mais la version purement orchestrale est sans doute loin d’être la plus connue ! Et puis il y a des grandes raretés comme la fantaisie pour piano et orchestre Africa. C’est plus de trente ans de l’œuvre de Camille Saint-Saëns qui est ici balayée. Et pour servir ces partitions, rien de moins que François-Xavier Roth à la tête de sa formation Les Siècles. Orchestre historiquement informé jouant sur instrument d’époques, ils sont toujours d’une probité exemplaire et d’un engagement constant, surtout sous la conduite d’un chef passionné par ce répertoire ! Et pour les accompagner, voici deux grands noms parmi les musiciens solistes : Renaud Capuçon et Bertrand Chamayou ! Un concert qui s’annonçait donc sous les meilleurs auspices ! Continuer…

Saint-Saëns comme on voudrait l’entendre plus souvent à la Philharmonie de Paris

Pour l’ouverture du huitième Festival Palazzetto Bru Zane de Paris, Camille Saint-Saëns était bien sûr à l’honneur avec une partition extrêmement rare : The Promised Land, oratorio anglais créé dans la dernière décennie du compositeur et créé en 1913. La partition avait été perdue à partir de 1916 puis retrouvée pour des concerts en 2005. La distribution était brillante et on attendait forcément beaucoup de ce moment. Malheureusement, la crise sanitaire est passée par là, empêchant de réunir un effectif aussi immense que le demande l’ouvrage (en 2005, il y avait environ 300 artistes pour la recréation). Le programme fut donc changé, mais encore consacré à Camille Saint-Saëns fort heureusement. Nous aurons donc un programme assez traditionnel dans sa forme : une ouverture (de la Princesse Jaune), un concerto (pour violoncelle) et une symphonie (le troisième avec orgue bien sûr !). Du premier programme restent donc le compositeur ainsi que le chef et l’orchestre. Car ce sont toujours les forces de Toulouse qui viennent rendre hommage au génial compositeur alors que l’Opéra de Paris encore une fois ne fait rien pour le centenaire de sa mort. Si ce concert n’est peut-être pas le plus original qui soit, il marque tout de même encore un retour : le retour personnel dans la grande salle de la Philharmonie avec un grand orchestre moderne. Après l’Opéra-Comique et Orfeo, on change totalement de style et d’ambiance pour un concert splendide ! Continuer…