Cyril Auvity, divin Orfeo de Monteverdi

Création 2017 Théâtre de Caen Orféo

Depuis quelques années, Paul Agnew explore tous les livres de madrigaux de Claudio Monteverdi. Après avoir chanté et donc dirigé cette très large composition de celui qui est considéré comme l’inventeur de l’opéra, le haute-contre nous propose un Orfeo où il met non seulement en avant la beauté de la partition, mais aussi tout le talent des Arts Florissants en tant qu’ensemble instrumental comme vocal. Car au travers de cette production, c’est toute cette grande famille qui est mise en lumière. Le chef historique William Christie cède sa place à son protégé mais les participants sont les amis de toujours, les admirables musiciens qu’on retrouve dans de nombreuses productions de l’ensemble. Présentée comme uniquement mise en espace dans le programme de la Philharmonie de Paris, ce spectacle sera finalement total car c’est l’intégralité de la mise en scène créée à Caen qui est offerte au public pour une immersion dans un monde musical et mythologique sidérant de beauté. Continuer…

Jeanne d’Arc et Tchaikovsky : Succès parisien

La venue de la troupe du Bolchoï est déjà un immense événement, mais quand en plus il vient offrir au public parisien un ouvrage aussi rare que La Pucelle d’Orléans de Tchaïkovsky, comment résister ? Et il semble que le public est venu en masse pour voir cette partition passionnante du compositeur. Rarement donnée surtout en dehors de la Russie, elle est aussi rare au disque puisque l’on ne trouve que deux versions studio et une captation en direct… ainsi qu’un DVD. Pourtant basé sur une pièce de Schiller, cet opéra russe a tout pour passionner les occidentaux et encore plus la France avec l’un de ses personnages historiques. Mais en dehors de quelques rares représentations et de l’air de l’héroïne, l’opéra reste peu diffusé. Heureusement cette soirée aura fait découvrir la partition passionnante dans de formidables conditions. On ne peut que remercier Tugan Sokhiev et la Philharmonie de Paris pour nous avoir fait ce superbe cadeau ! Espérons que l’expérience soit renouvelée dans les saisons à venir ! Continuer…

Ludovic Tézier : Simon de concert

Ludovic Tézier

Ouvrage fascinant, Simon Boccanegra reste un des chef-d’œuvres trop peu montés de Verdi. Bien sûr, la partition est connue grâce entre autre à la mythique production dirigée par Abbado et mise en scène par Strehler qui alignait une distribution grandiose (Cappuccilli, Freni, Ghiaurov…). Mais face à des ouvrages tels que La Traviata ou Il Trovatore, la partition manque de notoriété et est principalement montée pour un grand baryton capable de tenir l’ouvrage. Car c’est peut-être l’un des plus beaux rôles de barytons qu’ait composé Verdi. La complexité psychologique et le charisme qu’il donné au Doge est assez unique dans son Å“uvre. Aussi, quand il a été annoncé que Ludovic Tézier devait chanter le rôle, et de plus accompagné par Sondra Radvanovsky… on espérait une immense soirée. Le résultat fut en effet très bon, mais toujours avec l’ombre de grands interprètes. Car deux prises de rôles en version de concert, cela n’aide pas à créer des personnages totalement convaincants. Continuer…

Orfeo de Rossi : Immense réussite

Acte I : Francesca Aspromonte (Eurydice), Judith van Wanroij (Orphée)

Lorsque l’on évoque le personnage d’Orphée à l’opéra, on pense bien sûr à l’œuvre de Monteverdi qui a été considéré à tord comme le premier opéra… ou encore les différentes partitions de Gluck… voir même l’Orphée aux Enfers d’Offenbach. Mais restent dans l’ombre des partitions fascinantes concernant cette légende. La Morte d’Orfeo de Landi par exemple qui raconte la fin de vie du poète et qui est justement la suite du spectacle qui nous occupe : l’Orfeo de Luigi Rossi. Composé l’époque où Monteverdi offrait son Incoronazione di Poppea, on y retrouve la même structure alternant passages comiques et grande tragédie, la même puissance du texte et du théâtre. Cette production avait fait un triomphe la saison précédente à Nancy et Versailles déjà et pour notre plus grand plaisir voici qu’elle était proposée à nouveau avec exactement la même distribution. On retrouve donc toute la richesse de la partition magnifiée par une réalisation en tous points splendide. Continuer…

Salieri, Europa Riconosciuta : Enfin!

Enfin ! Et c’est un enfin à plusieurs titres. Déjà on peut saluer le retour en grâce de Salieri, trop associé dans l’esprit de beaucoup à la mort de Mozart, surtout après le film Amadeus de MiloÅ¡ Forman qui le désignait comme empoisonneur. Car si le nom est connu et si quelques enregistrements existaient déjà, on peut voir un certain regain d’intérêt pour ce compositeur, montrant ainsi au plus nombreux qu’il n’était pas juste un jaloux, mais bien un très grand compositeur. Et il savait s’imposer dans plusieurs styles ! Le Palazetto Bru Zane a publié Les Danaïdes et vont suivre Les Horaces (et normalement Tarare dans l’avenir) pour les tragédies de style parisien, mais retrouver cet ouvrage Europa Riconosciuta publié est une bonne chose car il documente non seulement un autre style parfaitement maîtrisé par Salieri, mais aussi un ouvrage passionnant dans sa forme. L’autre « enfin » est motivé par l’attente de la publication de cette représentation. Elle avait été filmée et diffusée à la télévision mais cela faisait maintenant douze ans et on pouvait logiquement douter de sa publication officielle. Enfin nous voilà soulagés ! Continuer…

Triomphe de l’Opéra-Comique avec Fantasio!

D’Offenbach, le grand public connaît bien sûr quelques Å“uvres légères comme La Belle Hélène ou La Grande Duchesse de Gérolstein… et bien sûr les Contes d’Hoffmann. Mais il existe de nombreux autres ouvrages qui doucement sont redécouverts par le travail de passionnés, que ce soit des éditeurs ou des musicologues comme Jean-Christophe Keck. Fantasio fait partie de ces partitions rares, et même tellement rares qu’on pensait difficile de la reconstituer suite à l’incendie de la Salle Favart en 1887. C’est donc une grande résurrection à laquelle nous assistons. Et c’est aussi l’occasion pour l’Opéra-Comique de reprendre ses activités suite à dix-huit mois d’arrêts pour la rénovation de la Salle Favart. Pour cette occasion, l’institution a réuni non seulement une superbe distribution, mais aussi un chef et un metteur en scène très impliqués dans cette production, dont nous avons pu suivre presque au jour le jour les avancées par l’intermédiaire de publications. Ce douze février était donc le retour de Fantasio sur scène, mais aussi les débuts d’une nouvelle saison pour l’Opéra-Comique qui manquait au paysage lyrique de Paris ! Seule petite déception, ce n’est pas dans la Salle Favart toute neuve qu’est représentée cette Å“uvre mais au Théâtre du Châtelet suite aux retards des travaux… Théâtre du Châtelet qui fermera d’ailleurs bientôt lui aussi pour rénovations. Continuer…

Lohengrin : deuxième distribution luxueuse!

Stuart Skelton

À l’annonce de la saison dernière, la présence de Jonas Kaufmann dans cette mise en scène de Lohengrin de Claus Guth faisait espérer un grand moment. Connue par la diffusion télévisuelle lors de l’ouverture de la saison en 2012, elle avait fait forte impression et semblait être une grande réussite. Mais si la première distribution faisait rêver avec les grands noms de René Pape, Jonas Kaufmann ou encore Evelyn Herlitzius et Wolfgang Koch (le Wotan de Bayreuth), une deuxième distribution promettait aussi de belles soirées. La jeunesse mais aussi l’expérience pouvaient promettre des émotions différentes mais tout aussi fortes. La jeunesse pour Stuart Skelton ou de Edith Haller, et l’expérience de Michaela Schuster par exemple. Pour une deuxième distribution moins connue, ces chanteurs étaient tout de même déjà reconnus comme de grands interprètes de la musique de Richard Wagner. Après la production de Robert Carsen qui avait vu Ben Heppner, Mireille Delunsch ou encore Waltraud Meier lors de la dernière reprise, le souvenir était assez lourd à porter pour cette nouvelle production, mais encore plus pour cette deuxième distribution qui devait bien sûr lutter contre ceux qui avaient ouvert cette série de représentations quelques semaines avant ! Continuer…

Carmen : Lemieux et Spyres plus que convaincants!

Carmen est régulièrement donné à Paris. Depuis quelques années nous avons eu droit à la maintenant presque légendaire production dirigée par Gardiner avec Anna Caterina Antonacci dans le rôle titre, dans l’écrin parfait de l’Opéra-Comique… ainsi que la production assez mitigée de l’Opéra Bastille avec la même Antonacci dans le rôle titre. Alors pourquoi proposer deux soirées en version de concert d’une Å“uvre qui est certes particulièrement populaire… mais qui va voir une reprise à Bastille dans quelques temps ! Le Théâtre des Champs-Elysées a misé sur l’originalité de la distribution et particulièrement sur les deux rôles principaux. En effet, alors qu’elle commence à élargir son répertoire vers le répertoire romantique, Marie-Nicole Lemieux fait ses premières armes dans le rôle de la Carmencita après avoir chanté quelques semaines auparavant Rodelinda de Haendel sur cette même scène. Grand écart stylistique et vocal entre ces deux rôles. On pourra aussi rappeler que Michael Spyres est actuellement salué sur les plus grandes scènes pour ses prestations dans le bel canto romantique et particulièrement Rossini où il reprend tous les grands rôles de baryténor du répertoire avec un succès certain. La curiosité est donc là… et en ce 2 février, la salle était particulièrement pleine ! Continuer…

Diptyque autours d’Å’dipus Rex à Aix-en-Provence

Difficile de passer à côté d’Œdipus Rex, même si l’adaptation réalisée par Sellars et Salonen pouvait poser problème sur le principe. En effet, cette ouvrage repose non seulement bien sûr sur la musique de Stravinsky, mais aussi les textes marquants de Cocteau qui s’intercalent et animent les monuments musicaux. Alors cette idée d’intégrer des textes issus de l’Antigone de Sophocle, pourquoi pas, mais est-ce qu’on aura la même force expressive que l’œuvre originale ? Et qu’en est-il de cette Symphonie de Psaumes qui doit présenter l’errance et la mort d’Œdipe ? Et puis je dois bien avouer que la vue de certaines photographies n’étaient pas pour me rassurer… Et finalement, c’est un moment assez magique qui restera longtemps gravé dans ma mémoire je pense tant le tout fonctionne admirablement bien ! Continuer…

Les Contes d’Hoffmann… ou de Nicklausse… ou de Carsen?

hoffmann_onp_9Un mise en scène reconnue pour son intelligence et sa beauté, une distribution réunissant ce qui se fait de mieux… cette reprise des Contes d’Hoffmann avait de quoi faire rêver ! Malheureusement, durant l’été une première mauvaise nouvelle tombait avec l’absence de Sabine Devieilhe qui devait chanter Olympia. Enceinte, elle ne pouvait pas assurer ces représentations. Restait la grande attraction : la prise de rôle de Jonas Kaufmann pour Hoffmann. Tremblement en début d’automne avec l’annulation du chanteur, remplacé par Ramon Vargas… Les billets sont rapidement devenus très disponibles en revente… Restaient trois dates où Stefano Secco assurait comme prévu les trois dernières représentations. Doublure sûrement de Kaufmann, il bénéficiait de trois séances pour démontrer qu’il n’était pas juste un remplaçant. Et ce qu’il a proposé ce soir le montre à la hauteur du rôle, même s’il se fait finalement voler la vedette par son acolyte Nicklausse chanté et vécu de manière sidérante par la grande Stéphanie d’Oustrac ! Continuer…