Légendes : Rencontre entre Liszt et Gounod

equilbeycjana_jocif1_hdIl faut bien l’avouer, c’est avant tout pour le Saint François d’Assise de Gounod qui motivait le déplacement pour ce concert… Ayant déjà entendu l’ouvrage en l’Église Saint-Eustache il y a quelques années, je me réjouissais de pouvoir retrouver cette pièce. Mais finalement, c’est presque tout le concert qui fut magnifique et une vraie bonne surprise ! Face à un public très attentif et calme, des partitions très rares ont été magnifiquement mises en avant par les musiciens comme par les chanteurs. Une grande journée de découverte qui sera normalement enregistrée pour une parution discographique dans les années qui viennent, sûrement à l’occasion du bicentenaire de la naissance de Gounod… Continuer…

La Juive : 3/4 de la partition, mais une grande réussite!

ju12Pilier du répertoire de l’Opéra de Paris durant des années, régulièrement monté dans tous les théâtres de France… comment La Juive a pu tomber dans un tel silence ? Car il faut bien l’avouer, pendant de nombreuses années le grand succès de Jacques-Fromental Halévy a été très discret sur les scènes. Bien sûr, quelques ténors ont réussi à lui apporter une légère notoriété comme Richard Tucker, José Carreras ou encore Neil Schicoff… mais c’était l’artiste qui imposait l’ouvrage. En France, ce qui avait été un ouvrage très populaire devenait doucement une image déformée et vieillotte. La Juive ne pouvait pas être intéressante. Et puis enfin en 2007, l’Opéra de Paris jouait son rôle en montant avec une distribution éclatante cet ouvrage trop rare. Les premières représentations n’étaient pas pleines, mais le bouche à oreille faisant son effet, ce sont finalement à guichet fermé que les dernières eurent lieu. Enfin la partition était de retour. Ou au moins en partie car il fallait composer avec les coupures. L’année dernière, l’Opéra de Nice se lançait dans une nouvelle production, et c’est enfin l’Opéra de Lyon qui nous donne à voir et à entendre ce chef d’œuvre de l’art musical et théâtrale français. En mettant Olivier Py à la mise en scène, on pouvait espérer non seulement une scénographie fouillée, mais aussi une partition complète comme l’avait été Les Huguenots à Bruxelles. Si le premier souhait sera réalisé, la partition reste encore bien défigurée… Continuer…

Die Frau Ohne Schatten, Böhm 1955 : tout simplement légendaire!

FROSCH_55Il est commun de parler pour certains enregistrements de disques légendaires ou mythiques… mais s’il en est bien un qui mérite ces qualificatifs, c’est l’enregistrement studio de Die Frau Ohne Schatten de 1955 pour DECCA dirigé par Karl Böhm. Non seulement il est d’une qualité admirable, mais les circonstances de son enregistrement, sa place dans la discographie de l’œuvre, sa rareté et son témoignage d’une époque ajoutent encore à l’aura qui le pare. Bien sûr, d’autres enregistrements de cet opéra magique de Richard Strauss sont reconnu et admirés, avec bien sûr d’autres captations dirigées par Böhm (en 1977 par exemple), Karajan ou Solti. Mais voilà… peuvent-elles rivaliser d’un point de vue historique ? Sans parler de la qualité qui est somme-toute souvent relatif en fonction des préférences de chacun… quelle autre enregistrement d’opéra a inspiré une mise en scène de ce même opéra par exemple ? Bien peu… Cette version est certes affligée de coupures, mais pour l’époque, la partition est plutôt bien conservée si l’on compare à certains enregistrements postérieurs ! Continuer…

Don César de Bazan : déjà Massenet!

Sabin Revault d'Allonnes (Maritana), Jean-Baptiste Dumora (Don César de Bazan)

Sabin Revault d’Allonnes (Maritana), Jean-Baptiste Dumora (Don César de Bazan)

En 1872, Jules Massenet propose son premier opéra de grande forme, après une Grand’Tante en un acte. Alors très peu connu, c’est une grande avancée pour le jeune compositeur qui a ainsi le public de l’Opéra-Comique pour se faire un nom. Malheureusement, le succès sera mitigé, et en 1887 la partition orchestrée brûle dans le deuxième incendie de la Salle Favart. Massenet n’est plus alors un inconnu à Paris puisqu’il y a proposé quatre opéras entre temps : Le Roi de Lahore (1877) et Le Cid (1885) sur la scène de l’Opéra de Paris ainsi que Manon (1884) à l’Opéra-Comique. À cela s’ajoute Hérodiade créé à Bruxelles en 1881. Ce n’est donc plus le jeune compositeur qui décide de reprendre la partition de Don César de Bazan pour en donner une nouvelle version orchestrée et avec des lignes vocales modifiées en 1888. En ce dimanche 13 mars 2015, c’est bien sûr cette deuxième version qui est représentée sur les planches du Théâtre Saint-Martin grâce à l’implication d’artistes qui nous donnent un spectacle plein de fraicheur et de vie. Servie de telle manière l’œuvre se montre sous son meilleur jour pour une découverte très intéressante. Continuer…

La Jacquerie : Lalo ou Coquard?

couvertureÉdouard Lalo a connu le succès à l’opéra grâce au Roi d’Ys. Son premier essai Fiesque n’a jamais été monté de son vivant, alors que sa dernière tentative le verra mourir avant qu’il n’ait achevé sa composition. Son premier opéra a été monté et enregistré à Montpellier il y a quelques années et c’est au tour de La Jacquerie de renaître d’abord en juillet dernier toujours à Montpellier puis maintenant à Paris pour une reprise inespérée. On retrouve pour l’occasion trois des protagonistes de la recréation : Véronique Gens et Nora Gubisch reprennent leur rôle sous la baguette de Patrick Davin. Le reste de la distribution est totalement renouvelée avec soin, alignant des chanteurs reconnus et très à l’aise dans ce répertoire. Il est rare que ces résurrections soient ainsi suivies d’une autre production et il faut saluer le travail du Palazetto Bru-Zane et de Radio-France qui osent ainsi monter un ouvrage aussi rare qui demande de plus un effectif important. Continuer…

Stéphanie d’Oustrac : Aiglon triomphant

Aiglon_1Composé à quatre mains en 1937, L’Aiglon d’Arthur Honegger et Jacques Ibert se base sur la pièce d’Edmond Rostand pour nous entrainer vers le destin tragique de ce fil écrasé par son père même après sa mort. La collaboration entre les deux compositeurs a été magistrale car la continuité est parfaite lors des changements d’actes. Si Ibert se concentre sur les actes extrêmes, Honegger nous propose les actes deux à quatre. On entre dans le quotidien de ce duc de Reichstadt qui se voit poussé vers un destin qu’il souhaite et redoute, destin qui l’écrase. En donnant le rôle à une voix féminine, les compositeurs ont renforcé la jeunesse du rôle, lui prêtant une voix adolescente et particulièrement tragique dans ses doutes. La production ici reprise est restée dans les esprits suite à la participation de la fulgurante Alexia Cousin, et pour beaucoup Stéphanie d’Oustrac relevait un gant peut-être trop lourd. Le résultat est stupéfiant de force et prouve combien la mezzo-soprano sait s’immerger dans un rôle aussi fort. Continuer…

Retour du Dante de Godard

Benjamin Godard (1849-1895)

Benjamin Godard (1849-1895)

Presque un an jour pour jour après le retour en grâce de Cinq-Mars de Gounod, l’Opéra Royal de Versailles accueillait en ce 2 février une Å“uvre jamais reprise depuis sa création : Dante du peu connu Benjamin Godard. Bien sûr, la Fondation Bru-Zane est à l’initiative de cette re-création et on retrouve des habitués de ses productions : Véronique Gens, Edgaras Montvidas, Andrew Foster-Williams, Ulf Schirmer et les forces de Munich. Si l’année dernière, la soirée était portée par le nom du compositeur, il n’en était rien pour Godard qui reste assez peu connu. Pourtant, le public s’est déplacé avec une belle curiosité puisque la salle était presque pleine. Appelé à faire partie de la collection de livres-disques consacré à l’Opéra Français, ce Dante rivalisera difficilement avec la dernière parution Herculanum ou avec le futur Cinq-Mars. Mais la partition est loin d’être inintéressante avec des fulgurances superbes qui sont malheureusement accompagnée de moments beaucoup moins inspirés. La musique est efficace et devait sûrement donner un effet impressionnant à bien des moments avec une mise en scène, mais le livret n’est pas des plus réussis malheureusement. Continuer…

Maria Stuarda : deux reines à Avignon

Marie Stuart durant l'exile en Angleterre (anonyme d'après Nicholas Hilliard)

Marie Stuart durant l’exile en Angleterre (anonyme d’après Nicholas Hilliard)

Maria Stuarda fait partie de cette fameuse trilogie Tudor qui rassemble aussi Anna Bolena et Roberto Devereux. Comme à chaque fois, l’un des personnages féminin est prépondérant, mais ici il ne peut véritablement vivre sans avoir un fort caractère en face. En effet, sans une Elisabetta de haute volée, comment donner tout son caractère tragique à la reine d’Écosse emprisonnée ? Comment faire vivre aussi ces affrontements entre deux femmes de même rang et au caractère bien trempé ? Car si le rôle titre nous est présenté à bien des moments comme une douce jeune fille, il ne faut pas oublier qu’elle était reine avant tout et que la noblesse de l’une doit se heurter à celle de l’autre. Avec la prise de rôle de Joyce DiDonato, les tessitures ont été inversées sur plusieurs scènes : Elisabeth revenait à une soprano corsée là où Maria Stuarda était donc chantée par la voix claire de la mezzo-soprano DiDonato. Ici c’est un retour aux traditions avec la soprano Patrizia Ciofi en martyre et la mezzo-soprano Karine Deshayes en violente Reine d’Angleterre. Deux chanteuses très différentes… et un affrontement magistral ! Continuer…

Véronique Gens et Susan Manoff : Royales!

gens-manoffVéronique Gens est une artiste passionnante qui semble aussi à l’aise dans la tragédie lyrique, le Grand Opéra romantique, Mozart ou les mélodies françaises. Et avec la complicité de Susan Manoff, elle propose un bouquet des mélodies de trois des compositeurs les plus doués pour la mélodie : Henri Duparc, Ernest Chausson et Reynaldo Hahn. Avec ces trois compositeurs, on aborde un même style de mélodies, mais par des angles différents. Chacun ici trouve des couleurs personnelles pour exprimer son caractère. Et Véronique Gens donne vie à ces miniatures de manière totalement saisissante. Loin de la réserve ou de la mièvrerie qui est souvent associée à ce répertoire, elle donne ses lettres de noblesse à tout un répertoire qui n’a pas à rougir face aux compositions dans d’autres langues. La salle Gaveau était ainsi l’écrin d’un moment de bonheur et d’émotions. Quel dommage que la salle soit loin d’être pleine ! Pourtant la sortie du disque proposant presque le même programme aurait dû attirer les foules des grands jours. Continuer…

Semiramide à Marseille : Révélations et superbe concert

Emmanuel Trenque, Mirco Palazzi, Jennifer Michel, Jessica Pratt, Varduhi Abrahamyan, Giuliano Carella, David Alegret, Patrick Bolleire, Samy Camps

Emmanuel Trenque, Mirco Palazzi, Jennifer Michel, Jessica Pratt, Varduhi Abrahamyan, Giuliano Carella, David Alegret, Patrick Bolleire, Samy Camps

Semiramide fait partie de ces monuments de l’opéra qu’on peine à monter. Problème de chanteurs? En partie… le souci vient de sa longueur, mais aussi des fantômes qui planent sur les rôles titres. En effet, il faut lutter avec le souvenir de ceux qui ont fait la Rossini-Renaissance : Marylin Horne, Rockwell Blake, Chris Merritt, Cecilia Gasdia ou Samuel Ramey. Difficile pour des chanteurs actuels de se mesurer à un tel poids. Pourtant, régulièrement l’ouvrage est remonté. Ici, c’est uniquement en version de concert, ce qui aura sûrement effrayé une partie du public habituel car la salle est à moitié vide. Et pourtant, de nos jours les talents sont bien présents pour donner vie à ces partitions inhumaines, créées pour les personnalités les plus diverses de l’époque de Rossini. Avec une distribution jeune, Marseille prouve combien ces ouvrages peuvent briller de tous leurs feux quand on cherche une distribution de qualité! Continuer…