Callas en direct – 5/5, 1958-1964 : La Traviata, Il Pirata, Poliuto et Tosca

Voici enfin la fin de cette série… nous sommes ici sur les dernières années de la carrière de La Divina. La voix a alors perdu son arrogance première, mais l’interprète reste comme toujours passionnante. Entre 1958 et 1964, son répertoire va se réduire, elle va abandonner certains rôles et nous avons donc les derniers feux. Paradoxalement, c’est sans doute l’une des périodes dont nous avons le plus d’enregistrements parfois douloureux. Ici, deux rôles qui auront marqués sa carrière et deux autres qui prouvent toute la curiosité qu’elle avait pour le bel-canto, réussissant à monter des ouvrages rares et quasi-oubliés sur de grandes scènes. On ne sait actuellement où en serait tout un pan du répertoire si elle n’avait pas commencé dans les années cinquante à remonter des opéras qui étaient alors si peu donnés. Continuer…

Mirella Freni : 1935 – 2020

Le 9 février 2020 s’est éteinte Mirella Freni à l’âge de 84 ans. Celle qui est présentée sous le nom de « Prudentissima », celle que tout le monde rapproche avant tout de Mimi dans La Bohème ainsi que de celui qui fut justement souvent son partenaire dans ce rôle : Luciano Pavarotti. Elle prenait congés des scènes en 2004 à la mort de Nicolai Ghiaurov… et quinze ans plus tard elle disparait. Mirella Freni, restera bien sûr dans les mémoires collectives… mais elle restera aussi pour moi la première. Car elle faisait partie de mon premier opéra acheté, car elle m’a fait découvrir un certain nombre d’ouvrages juste parce qu’elle le chantait. Le timbre, la musicalité, la délicatesse des portraits tout en donnant une force vitale immense au personnage… Voilà ce qui composait une chanteuse d’opéra immense par le talent, mais aussi d’une grande modestie et d’une grande sagesse. Toujours soucieuse de donner le meilleur d’elle-même, de ne jamais forcer sur son instrument pendant cinquante ans d’une carrière des plus riches, d’apporter sa touche personnelle aux personnages qu’ils soient parfaitement dans ses cordes vocales ou même qu’ils les dépassent un peu. Elle aura donné de magnifiques souvenirs à bien des spectateurs et auditeurs. Arrivé trop tardivement dans le monde passionnant de l’opéra, je n’ai jamais eu la chance de l’entendre en salle, mais rien que la croiser un jour au Théâtre du Châtelet restera un grand souvenir… Continuer…

Trio Ayonis, entre chansons et mélodies

Enguerrand de Hys fait partie des noms qui apparaissent régulièrement sur les programmes, souvent dans des petits rôles comme ce fut le cas dans La Nonne Sanglante, Fantasio ou Armide ces dernières années… Et le ténor se montre toujours aussi parfait vocalement, avec des personnages très bien calibrés pour sa voix. Mais récemment, c’est dans Tarare qu’il a marqué les esprits, chantant le rôle de Calpigi avec malice mais aussi cette dose de danger dans la voix lorsqu’il menace son maître. On sent que le chanteur a un grand potentiel pour donner vie à ces personnages même s’ils sont souvent très courts. Aussi, voyant qu’il allait donner un concert à Paris avec un programme original et intéressant… je me renseigne un peu et découvre ce Trio Ayonis formé avec Élodie Roudet et Paul Beynet. Les trois musiciens sont jeunes, particulièrement investis dans ces programmes qui mêlent mélodies, chansons et airs d’opéra. Aussi, après une rapide découverte sur Internet, voici que ce concert est obligatoire. Après le Gala Bru Zane, le format est bien sûr plus intime mais la curiosité est forte ! Continuer…

Jeune et brillante génération pour La Forza del Destino à Bastille!

Étrangement, alors que la partition de La Forza del Destino fait sans doute partie des plus belles de Giuseppe Verdi, elle n’a pas beaucoup été représentée à Paris ces dernières décennies. Entre 1981 et 2011, aucune représentation à l’Opéra National de Paris. Bien sûr, la production de 1975 a vu passer des grands noms comme Martina Arroyo, Piero Cappuccilli, Nicolai Ghiaurov, Martti Talvela, Kurt Moll, Fiorenza Cossotto, Placido Domingo… mais pourquoi ces trente ans d’interruption ? Peut-être est-ce dû à son argument assez redoutable tant pour le spectateur que pour le metteur en scène. Peut-être que la volonté de montrer un théâtre de plus en plus complexe et « humain » n’a pas aidé l’ouvrage à revenir sur la scène parisienne. Toujours est-il qu’en 2011, sous l’impulsion de Nicolas Joël alors directeur de l’institution, une nouvelle production est montée par Jean-Claude Auvray avec des grands noms : Marcelo Alvarez et Violetta Urmana, entourés de seconds rôles de haut niveau. Hélas, les petits problèmes de santé du ténor et le manque d’implication de la soprano (qui a toujours été beaucoup plus convaincante en mezzo-soprano) avaient légèrement gâché la fête. Pour cette reprise, c’était avant tout Anja Harteros qui attirait le public… mais en deuxième distribution se trouvait la jeune Elena Stikhina, toute joyaux découvert dans Wagner et qui avait remplacé il y a peu Sonya Yoncheva dans Tosca sur cette même scène de Bastille. Continuer…

Un Requiem de Verdi à grands effets à la Philharmonie de Paris

Il y a tout juste trois ans, Gianandrea Noseda avait bouleversé le public de la Philharmonie de Paris avec un Requiem de Verdi impressionnant de profondeur et de passion. Il pouvait compter sur des chanteurs habités et les forces de l’Orchestre de Paris et de son Chœur. Les murs de la salle avaient alors résonné comme rarement ! Depuis, d’autres sont venus comme Riccardo Chailly avec la Scala par exemple. Forcément, le nom de Teodor Currentzis avec son ensemble MusicAeterna semble étrange après ces grands spécialistes du répertoire verdien ! D’autant plus que les chanteurs sont globalement inconnus à l’exception de René Barbera étant donné que Varduhi Abrahamyan remplace Hermine May initialement programmée. Habitué des lectures radicales du chef avec son orchestre jouant sur instruments d’époques et souvent en s’inspirant des pratiques plus baroques que romantiques, l’attente était grande. En effet, on ne savait si l’on allait assister à une véritable révélation ou au contraire à une chose plus qu’étrange. Le chef avait donné par exemple à l’Opéra Bastille des Don Carlo et Macbeth bien peu convaincants mais depuis il a montré qu’il pouvait donner des choses impressionnantes dans le répertoire romantique avec son ensemble. Soirée qui ne devait donc a priori pas laisser indifférent ! Continuer…

Un Bal en noir et blanc pour Sondra Radvanovsky

A l’origine, cette reprise d’Un Ballo in Maschera dans la mise en scène insignifiante de Gilbert Deflo devait voir s’affronter deux grands artistes : Sondra Radvanovsky et Marcelo Alvarez. Il y a quelques mois, le ténor annonçait qu’il renonçait au rôle et donc il ne venait pas dans cette production qu’il créa pourtant il y a un peu plus de dix ans. Il faut dire que son répertoire s’est élargi depuis et l’on peut comprendre ce retrait. Mais du coup, l’affiche semblait bien déséquilibrée et n’affichait donc plus que la grande soprano qui triomphe actuellement dans tous les plus grands théâtres. Ajoutons à cela le retrait définitif des scènes de la mezzo-soprano Luciana D’Intino qui devait chanter Ulrica… et cette série avait tout pour se transformer en récital accompagné. Mais au final, en allant chercher des chanteurs plus jeunes mais de haut niveau, l’Opéra de Paris nous a proposé un spectacle de haute tenue. L’ouvrage de Verdi est bien sûr passionnant, mais le chant l’aura été tout autant ! Continuer…

Callas en direct – 2/5, 1952 : Armida, Norma et Macbeth

Cette deuxième partie du retour sur le coffret regroupant des témoignages en direct de Maria Callas est uniquement centré sur 1952, année où l’on pourrait considérer que la voix est à son zénith : elle a conservé la largeur des premières années dramatiques, tout en ayant gagné déjà tous ses galons de technicienne. C’est donc une voix immense, dramatique à souhait… mais aussi à la technique flamboyante et virtuose. Et l’on a encore ces quelques rôles qu’elle n’abordera plus par la suite comme dans le Rossini seria ou cette fameuse Lady Macbeth. En avançant dans les années et avec la popularité grandissante, on pourrait penser que chacune de ses prises de rôles serait enregistrée avec soin pour un témoignage. Il n’en est malheureusement rien et on verra par la suite combien certains témoignages restent difficiles à écouter. Mais l’on continue à découvrir le parcours de l’artiste vers le bel-canto sur lequel elle va régner par la suite ! Continuer…

Erwin Schrott, Attila conquérant en concert

Perpétuant la traditionnelle venue de l’Opéra de Lyon à Paris, Daniele Rustioni change le thème. Après les opéras belcantistes dirigé par Pidò, voici Verdi et par n’importe lequel vu que c’est rien moins qu’Attila, ouvrage de jeunesse rarement donné mais qui apporte des moments de vrai bonheur musical. L’ouvrage est souvent monté pour une basse avant tout. Samuel Ramey bien sûr… mais aussi Nicolai Ghiaurov par exemple qui nous laissé un superbe enregistrement avec l’immense Piero Cappuccilli. Et il faut aussi trouver une soprano capable de surmonter l’écriture impossible d’Odabella (Cheryl Studer pour Ramey par exemple, ou la controversée mais passionnante Mara Zampieri pour Ghiaurov. Le concert ici présenté rassemble de beaux noms, surtout après l’arrivée surprise d’Erwin Schrott dans le rôle-titre. Le jeune chef italien conduit donc une distribution de haut niveau avec un orchestre et un chœur dont on connaît les qualités. Reste à savoir si l’ouvrage va survivre à la version de concert, mais aussi si les chanteurs réussiront à se hisser à la hauteur de ces personnages démesurés que le jeune Verdi a composés. Continuer…

Don Carlos, toujours aussi passionnant!

Après la distribution qui créa cette mise en scène un mois auparavant, voici qu’une partie de la distribution est renouvelée pour notre plus grand plaisir ! Attention, la première était de haute volée avec une brochette de stars assez impressionnante. Mais cet ouvrage est tellement passionnant qu’il est toujours bon d’entendre d’autres possibilités vocales dans un même rôle. Il est regrettable dans un sens que l’Opéra de Paris n’ait pas donné sa chance à de jeunes chanteurs à la diction particulièrement incisive, qu’ils soient francophones ou non… mais cela aura déjà mis en avant des artistes qui n’ont peut-être pas la lumière qu’ils méritent étant donné leur talent. Pour les rôles d’Élisabeth, d’Eboli et Carlos, c’est vers l’Europe de l’est qu’il faut donc tourner notre regard une nouvelle fois avec non pas de jeunes espoirs, mais déjà des artistes accomplis même si moins médiatiques que Jonas Kaufmann, Sonya Yoncheva et Elīna Garanča. Beaucoup prédisaient une chute spectaculaire de l’intérêt du spectacle, mais il n’en fut rien. Bien sûr, au petit jeu de la comparaison certains ont trouvés des failles dans les chanteurs de cette deuxième distribution, mais la première en possédait aussi ! Et ils ont tous apportés un petit quelque chose d’intéressant qui faisait qu’ils rivalisaient finalement avec leurs prédécesseurs. Continuer…

Retour de Don Carlos à l’Opéra de Paris!

Enfin ! Enfin un retour à Don Carlos en français. Enfin la version originale de 1866 (avant la création). Enfin une distribution à la hauteur de l’ouvrage. Sans conteste l’événement de cette nouvelle saison, cette production réunit beaucoup d’atouts pour attirer tous les regards. On l’a dit déjà la version choisie est extrêmement rare. Si Stéphane Lissner avait déjà proposé un Don Carlos au Châtelet, la version retenue était loin de la rigueur de cette nouvelle production. En choisissant la partition dans l’état qui précédait la création, nous avons toute la musique composée par Verdi en vue d’être représentée. C’est pour la première que les coupures furent pratiquées, afin que le public puisse rentrer chez lui à une heure raisonnable. La seule coupure notable ici est le ballet, élément obligatoire dans ce genre. Cette version de l’œuvre avait été enregistrée en 1972 par John Matheson à la BBC pour Opera Rara, mais depuis, il est rare de pouvoir l’entendre. Et surtout il est encore plus rare de l’entendre avec de tels interprètes. L’Opéra de Paris a en effet appelé cinq des plus grands chanteurs actuels, chacun au sommet de leur catégorie vocale respective : Jonas Kaufmann, Sonya Yoncheva, Elīna Garanča, Ludovic Tézier et Ildar Abdrazakov. Enfin, pour ménager un petit scandale, c’est Krzysztof Warlikowski qui est à la direction scénique, pour une production qui devra être reprise par la suite dans la version italienne en quatre actes. Espérons juste qu’elle sera aussi reprise dans la version originale. Continuer…