Charles Simon Catel a eu la mauvaise idée de composer à une période trouble de l’histoire de France, devant changer de style au gré des changements de régime politique suite à la Révolution Française. Mais à cela, il a ajouté le titre de premier professeur d’harmonie du tout nouveau Conservatoire de Paris fondé en 1795. Et de fait, il restera dans les mémoires comme un grand pédagogue et théoricien (son Traitée d’Harmonie de 1802 restera longtemps un modèle) mais non comme un musicien artiste. Compositeur de circonstance lors des grandes fêtes révolutionnaires, il n’en fut pas moins un homme de théâtre et après nous avoir offert Sémiramis, le Palazetto Bru Zane nous donne à entendre Les Bayadères. Ces deux Å“uvres aux influences variées nous montrent combien le musicien était raffiné, fin et aussi très apte à créer une tension dramatique, cherchant des solutions que l’admiration de Gluck avait empêchée. Un novateur donc qui est heureusement rétabli de nos jours. Continuer…
Intégrale
Bru Zane ressuscite Victorin Joncières : Dimitri
Qui encore connaît le nom de Victorin Joncières de nos jours ? Il faut avouer qu’il n’aura jamais connu le grand succès de certains compositeurs d’opéras, n’ayant pas eu la chance d’être porté par les grandes institutions musicales de son temps comme l’Institut de France (où sa candidature fut refusée) ou l’Opéra de Paris (son plus grand succès, le fameux Dimitri, fut créé au nouveau Théâtre Lyrique et non dans la grande boutique). Alors pourquoi avoir ressorti des rayonnages des bibliothèques cette partition ? Elle est l’exemple de ce qui se faisait au Théâtre Lyrique de Vizentini durant les vingt mois où cette institution proposa nombre de créations audacieuses avec une qualité d’exécution digne de l’Opéra. Premier grande création de cette salle, il se devait d’être proposé à l’écoute ! Continuer…
Un Parsifal apaisé par Van Zweden
Parsifal est de ces opéras qui peuvent fasciner ou rebuter… à l’origine on peut ressentir quelques longueurs et lenteurs, mais en la fréquentant plus, se découvrent certaines clés, certains plaisirs… et aussi les grandes possibilités d’interprétation musicale de la partition. En effet, si la « formation » de beaucoup a été effectuée avec la mythique version dirigée par Hans Knappertsbusch en 1951, la découverte d’autres versions montre des facettes différentes, tantôt délicates, monumentales, colorées, sombres, élégiaques… Chaque chef peut avoir sa façon de diriger l’œuvre, en exhalant des spécificités. En décembre 2010, c’est l’ancien violoniste Jaap van Zweden qui en donnait sa lecture à Amsterdam pour quelques concerts heureusement captés. La distribution réunit des valeurs sûres du chant wagnérien et la réputation de l’Orchestre de la Radio Néerlandaise n’est plus à faire. Continuer…
Tchaïkovsky, La Pucelle d’Orléans : Preobrazhenskaya ou Arkhipova?
Étrange opéra que cette Pucelle d’Orléans. Peu de temps après avoir composé Eugen Onegin, opéra intimiste s’il en est, voici que Tchaïkovski se penche sur un format beaucoup plus large où les références au Grand Opéra à la française sont légion. Le sujet quitte les salons ou les mythes russes pour s’ancrer dans l’histoire française. Piotr Tchaïkovski adapte à partie de 1878 la tragédie de Schiller pour en faire un opéra retraçant l’évolution d’une figure historique : Jeanne d’Arc. Et dans cet opéra, c’est le seul personnage qui retiendra l’attention, le seul qui parcourt l’ensemble de la partition en rencontrant des aides, des soutiens, des tentations, des obstacles… les autres personnages ne sont au final rien d’autres que des éléments faisant évoluer Jeanne. Ce rôle de mezzo-soprano demande de grandes interprètes et l’histoire du disque en a retenu deux : Sophia Preobrazhenskaya et Irina Arkhipova. Petite comparaison de leurs enregistrements studio… Continuer…
« L’autre » Otello mis à l’honneur par Bartoli…
Otello dans l’opéra, c’est immanquablement celui de Verdi qui nous vient à l’esprit. Puis arrive ce fameux opéra de Rossini, réputé inchantable avec ces trois rôles écrasants de ténor, cette Desdemona où se sont distinguées les plus grandes comme La Malibran ou sa sÅ“ur Pauline Viardot… Plus près de nous, le duo Chris Merritt/Rockwel Blake s’illustraient… puis un temporaire duo a réuni Gregory Kunde et Juan Diego Florez… mais voilà que depuis quelques année un nouvel Otello rossininien fait parler de lui : John Osborn. Quand en plus il est accompagné par Cecilia Bartoli (rossinienne exemplaire avant d’aller explorer le baroque) qui fait ici ces débuts dans le rôle tragique de l’épouse du Maure, on peut s’attendre à une grande représentation… et les faits vont bien au delà des espérances ! Continuer…
Fascinante Elektra par Patrice Chéreau
Rien que le nom de Patrice Chéreau associé à celui d’Elektra avait fait trembler d’impatience nombre de lyricomanes. Certains ont eu la chance de voir le spectacle dans le Grand Théâtre d’Aix en Provence, d’autres l’ont suivi sur Internet… et moins d’un an après, c’est en DVD que nous est servi ce spectacle. Résultat du montage de deux représentations et de plans serrés réalisés lors des dernières répétitions, on y retrouve l’impact visuel montré par le direct et particulièrement la prestation hallucinante et hallucinée d’Evelyn Herlitzius. Quelques mois après cet immense succès, le metteur en scène Patrice Chéreau disparaissait, rendant encore plus important son dernier travail lyrique.
Don Giovanni par Jacobs : Tellement logique !
Nourri depuis ma découverte de Don Giovanni par des versions « romantiques » de l’œuvre (Mitropoulos, Klemperer, Karajan, Furtwängler,…) je n’avais pas été convaincu par Harnoncourt. Mais voilà , je voulais tenter une version dite baroque de l’œuvre maintenant que le baroque m’a ouvert les bras. En voyant les critiques bonnes ou mauvaises sur la version de René Jacobs, je me suis laissé tenter. Je m’attendais à des tempi très vifs, un orchestre plutôt sec… en bref toute l’esthétique qu’on retrouve souvent quand un spécialiste du baroque se tourne vers Mozart et il n’en est rien ! Des voix plutôt amples, un orchestre rond et très nuancé, et des tempi très variés. Continuer…
Révélation de Thérèse de Massenet
A l’aise dans tous les styles lyriques qui régnaient sur les scènes françaises, Jules Massenet s’était essayé en 1894 au jeune vérisme venu d’Italie avec La Navarraise. Quelques années après, une autre Å“uvre ramassée et inspirée de cette école voit le jour sous la plume du musicien. Thérèse ne peut que faire penser au Andrea Chénier de Giordano composé dix ans plus tôt par son cadre révolutionnaire mais aussi par ses emprunts aux thèmes populaires de l’époque. Mais ce sont bien des personnages typiques de Massenet qu’on retrouve, dont la figure féminine centrale, création féminine toujours aussi passionnante du compositeur. Continuer…
Tannhäuser : la solitude de l’artiste
La place centrale que prend l’artiste dans Tannhäuser semble avoir bien souvent donné des idées aux metteurs en scène. Que ce soit le peintre chez Robert Carsen, ou l’élément d’espoir chez Sebastian Baumgarten à Bayreuth, on nous propose souvent de nos jours des visions un peu décalées du poète. Ici, on retrouve bien l’écrivain… mais si dans l’histoire, la passion est l’élément qui isole notre artiste, c’est ici l’inspiration créatrice qui s’oppose à une bourgeoisie figée et hautaine. En faisans un parallèle entre ce que vécu Wagner à son époque et Tannhäuser, le metteur en scène pouvait tenir une bonne idée. Malheureusement, bien des moments n’arrivent pas à convaincre tant l’idée est imposée sur une musique qui ne peut venir compléter ce que l’on voit et même vient en contradiction totale avec l’image. Continuer…
L’autre Rusalka… Historique!!
Lorsqu’on évoque Rusalka, on pense immanquablement à l’opéra de Dvorak. Mais dans l’ombre de cette Å“uvre remarquable se tient un autre chef d’œuvre composé par le russe Alexander Dargomyzhsky en 1848 et 1855, soit cinquante ans avant la partition du même nom. Et d’ailleurs, qu’on de communes ces deux compositions si ce n’est le nom ? La source d’inspiration n’est pas la même (Andersen chez Dvorak, Pouchkine chez Dargomyzhsky) et du coup l’histoire s’en ressent en nous montrant des personnages très différents, souvent avec des motivations contradictoires entre les deux histoires. Très rarement représenté hors de Russie, l’opéra compte pourtant quelques enregistrements, parmi lesquels deux de la grande époque du Bolshoï. C’est ici la seconde version qui est édité par Melodiya pour notre plus grand plaisir puisqu’il nous donne à entendre une partition magistralement rendue par des artistes légendaires. Continuer…