Dans les Jardins de William Christie 2019 : Odyssée Baroque

Cette année encore, la fin des vacances se passait chez William Christie, ou plutôt dans son jardin toujours aussi enchanteur. Le principe reste le même depuis maintenant de nombreuses années et le public est toujours autant au rendez-vous. Non seulement il peut écouter une musique de qualité dans une interprétation de haut niveau, mais en plus il le fait dans un cadre somptueux et même de plus en plus beau d’années en années. Car si tous les deux ans William Christie cultive des voix nouvelles dans son Jardin des Voix, il fait aussi grandir son jardin avec de nouveaux bosquets. Cette année était un peu particulière car les Arts Florissants fêtent leurs 40 ans en cette année 2019. Et même si la grande fête sera sans doute à la Philharmonie en fin d’année, nous avons tout de même droit à une atmosphère plus festive que d’habitude encore et on sent combien chaque artiste est attaché à cette ensemble.

Plan du Jardin de William Christie

Bien sûr, la journée ne serait pas aussi belle si le temps n’était pas de la partie. Car comme il est dit plus haut, le lieux est tout aussi magique que la musique. Et entendre ces mêmes pièces dans des salles de la région aurait été dommage. Aussi, c’est avec soulagement que le temps s’est amélioré durant la semaine qui précède ce vendredi 30 août. Dès l’arrivée à proximité de Thiré, on peut noter des évolutions dans la signalétique… et une fois en cœur de la ville, c’est dans les bâtiments que l’on peut remarquer les changements. Le chef d’orchestre semble petit-à-petit faire revivre la ville en rénovant des bâtiments. Bien sûr, le but est de faciliter ses activités et donc cela pourrait être vu comme une privatisation des lieux. Mais il ne faut pas oublier que ce centre ville de Thiré était très triste et sinistre il y a encore cinq ans lors de ma première venue au festival. Malgré son évolution qui voit plus de public et plus d’organisation, le festival Dans les Jardins de William Christie conserve son atmosphère agréable et détendue !

1 – Promenades musicales : Atelier, Fêtes d’anniversaire

Atelier, avec Sophie Daneman

Après avoir passé le petit pont de bois qui symbolise l’entrée dans les Jardins, il fallait choisir une première activité. Ce sera donc l’atelier chant, avec normalement des enfants… sauf qu’au début, aucun enfant au grand désespoir de Sophie Daneman qui cible sa présentation sur eux. Mais finalement une famille la sauve. Durant cet atelier, on va découvrir différents chants autour de l’anniversaire, et bien sûr chanter. Chanter en canon après s’être échauffés, écouter les musiciens et chanteurs autour de pièces célébrant les anniversaires. L’avantage de cet atelier est que l’on apprend des petits détails en rapport avec la musique, mais aussi sur les Arts Florissants étant donné que nous fêtons leurs 40 ans ! Et pour cela, le chant sera varié et toujours accompagné des solistes et des musiciens ! Que ce soit en français ou en anglais, chacun se mêle au chant et même les plus discrets se lancent à participer. Il faut dire que Sophie Daneman est une excellente institutrice tant elle fait partager son amour de cette musique et sait comment s’adresser aux enfants sans pour autant en oublier les adultes. Un moment très convivial !

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, sous une tente
  • 30 août 2019, 15h45
  • Atelier « Les Fêtes d’anniversaire»
  • Sophie Daneman, Animation
  • Juliette Perret, soprano
  • Jean-Yves Ravoux, ténor
  • Anicet Castel, basse
  • Edson Scheid, violon
  • Maximilian Morel, trompette (élève de la Julliard School)
  • Massimo Moscardo, théorbe
  • Béatrice Martin, clavecin
2 – Promenades musicales : Concerto pour luth

Le Mur des Cyclopes

Après ce premier petit concert dans une tente, voici que nous nous rapprochons du cœur du jardin. Nous nous arrêtons au Mur des Cyclopes, donc dans une partie encore assez sauvage du jardin, sous des arbres dans le creux d’une rivière pour écouter le {concerto pour Luth en ré majeur} de Vivaldi. Au calme malgré le monde qui vient assister à ce premier concert. Avec la rivière derrière et aussi le fameux mur, voici les musiciens qui s’installent. Mais il nous manque la star : Thomas Dunford se fait attendre. Il va finir par arriver, calmement, son luth pas encore accordé. Un peu de désinvolture peut-être oui… mais surtout on lui pardonne tant musicalement il offre un grand moment. Bien sûr, tout le monde connaît les Quatre Saisons de Vivaldi… mais c’est l’arbre qui cache la forêt car la grande majorité de ses concertos sont vraiment passionnants, pour des instruments divers et variés. Et ce concerto très contrasté avec des danses et des mouvements lents. La musique est d’une grande qualité et l’interprétation splendide. Les musiciens sont totalement impliqués : bien sûr il y a Douglas Balliett qui semble faire figure de chef avec les trois élèves de la Julliard School. Mais malgré la jeunesse des instrumentistes, ils sont totalement investis dans leurs parties avec une joie visible pour tous. Et bien Thomas Dunford est d’une musicalité impressionnante : le concerto demande à la fois de la virtuosité pour les deux danses extrêmes, mais aussi un moment beaucoup calme et mélodique pour le mouvement central. Dans les deux cas le luth sonne et vie, montrant combien Thomas Dunford est vraiment l’un des plus grands joueurs de cet instrument actuellement.

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, Le Mur des Cyclopes
  • 30 août 2019, 16h45
  • Concerto pour luth
  • Antonio Vivaldi (1678-1741) : Concerto pour luth en ré majeur
  • Rachell Wong / Chloe Kim, violons (élèves de la Julliard School)
  • Morgan Little, violoncelle (élève de la Julliard School)
  • Douglas Balliett, contrebasse
  • Thomas Dunford, luth
3 – Promenades musicales : Ballets de village

Le Petit Bois de d’Henry-Claude

Pour le concert suivant, il faut traverser l’ensemble du jardin, passer par le Miroir d’Eau où aura lieu le concert du soir… et on y voit alors la présence de caméras. Par la suite, on découvre aussi de nouvelles créations dans le jardin. Ainsi, depuis deux ans il continue à se développer et en l’occurrence c’est dans un nouvel espace que nous nous rendons : le petit bois d’Henry-Claude. Au milieu de bouleaux notamment, nous retrouvons pour un concert consacré à Boismortier. Une petite installation en bois inclinée permet au public de s’installer dans cette clairière afin de profiter de ces danses. Boismortier n’est pas le musicien le plus connu, mais il a proposé des partitions souvent pleines de couleur et de vie. Ici ce sont les élèves de la Juliard School qui sont mis à l’honneur. Ces jeunes musiciens sont invités par William Christie et ils font ici leurs premières armes aux côtés des Arts Florissants… ou entre eux comme ici ! L’ensemble manque peut-être un peu de cohésion durant quelques instants, mais les sonorités et le sens du rythme nous offre une vision champêtre du plus bel effet, surtout dans ce cadre. On regrettera juste la proximité de la route et donc des quelques bruits de voitures qui cassent l’atmosphère. Sinon, on peut juger de la grande qualité des instrumentistes encore une fois qui ici sont mis en avant chacun leur tour tout en formant un bel ensemble coloré et champêtre.

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, Le petit bois d’Henry-Claude
  • 30 août 2019, 17h15
  • Ballets de village
  • Joseph Bodin de Boismortier (1689-1745), Quatrième Ballet de Village
  • Joseph Bodin de Boismortier (1689-1745), Sérénade, ou Symphonie française
  • Joseph Bodin de Boismortier (1689-1745), Chaconne
  • Chiara Fasani Stauffer / Rachel Wong, violons (élèves de la Julliard School)
  • Berhanne Walker, flûte (élève de la Julliard School)
  • Matthew Hudgens, hautbois (élève de la Julliard School)
  • Georgeanne Banker, basson (élève de la Julliard School)
  • Morgan Little, violoncelle (élève de la Julliard School)
4 – Promenades musicales : Aux plaisirs, aux délices, bergères

La Pinède, Maud Gnidzaz et Massimo Moscardo

Retour dans la partie civilisée du jardin : la Pinède. C’est sûrement l’un des lieux les plus agréables de l’après-midi. Sur un gazon magnifique, sous des grands pins avec la maison de William Christie qui émerge des hautes haies, avec le pigeonnier à côté… c’est un endroit d’une telle quiétude que l’on aurait envie de s’y allonger pour se reposer. Mais le but de notre présence est bien sûr d’écouter un autre concert. Ce sera des mélodies de cours, du Guédron pour être précis. Nous avons ici les fondements des Arts Florissants et Maud Gnidzaz connaît parfaitement ce style très précis. La diction est parfaite et le sens des mots bien mis en avant. Que ce soit des mélodies gaillardes ou mélancoliques, sa voix trouve le juste sentiment et le juste ton pour donner vie à ces chansons de l’époque. La simplicité ne cache pas le grand travail de décorations discrètes, on entend parfaitement tout le texte et ces petites volutes. Pour l’accompagner, Massimo Moscardo se montre un petit peu terne… mais il faut dire que depuis quelques temps, c’est souvent Thomas Dunford qui accompagne ce répertoire dans les concerts vus récemment. Nous sommes ici dans un jeu beaucoup plus sobre et moins varié.

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, La Pinède
  • 30 août 2019, 17h45
  • Aux plaisirs, aux délices, bergères
  • Pierre Guédron (1565-1620), Aux plaisirs, aux délices, bergères
  • Pierre Guédron (1565-1620), Si le parler et le silence
  • Pierre Guédron (1565-1620), Dans ce bois si beau je m’amuse
  • Pierre Guédron (1565-1620), Belle qui m’avez blessé
  • Maud Gnidzaz, soprano
  • Massimo Moscardo, luth
5 – Promenades musicales : Oh how sweet it is to love

Les Coulisses du Théâtre

Pour le dernier concert dans les jardins, nous voici dans un autre nouveau lieu : les Coulisses du Théâtre. Le théâtre en question est le Théâtre de Verdure qui semble être devenu trop petit pour accueillir des concerts. Nous sommes donc juste derrière, en limite de la propriété à l’avant. Le public est venu nombreux car ici nous avons rien de moins que William Christie, Paul Agnew, Sophie Daneman et Thomas Dunford parmi les plus connus. Ils nous ont concocté un petit pastiche anglais à l’histoire très banale comme le dit Paul Agnew. Deux amoureux… elle ne l’aime plus, il se lamente… puis elle l’aime de nouveau. En allant piocher principalement dans la musique d’Henry Purcell, nous avons un très beau moment bucolique. Le symbole de faire chanter deux anciens des Arts Florissants est une belle image. Mais le fait que Sophie Daneman ne chante plus depuis quelques années n’est sans doute pas sans raison. Les débuts sont difficiles et l’on peut sentir que la chanteuse est extrêmement tendue. Mais après quelques minutes, le métier revient et si le timbre est un peu usé, la musicalité reste là. Paul Agnew semble beaucoup plus à l’aise pour camper le jeune amoureux. Les musiciens se montrent bien sûr magnifiques où l’on entend chaque instrument distinctement. Par contre, le manque de place oblige une grande partie du public à rester debout, ne pouvant ainsi profiter totalement du spectacle.

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, Les Coulisses du Théâtre
  • 30 août 2019, 18h15
  • Oh how sweet it is to love
  • Henry Purcell (1659-1695), The Virtuous Wife : Ouverture
  • John Blow (1649-1708), Welcome ode : Welcome to the Muses Feast
  • Henry Purcell (1659-1695), The Virtuous Wife : Song tune
  • Henry Purcell (1659-1695), Tyrannic Love : Ah how sweet it is to love
  • Henry Lawes (1595-1662), A Dilogue and a kiss
  • Henry Purcell (1659-1695), The Virtuous Wife : Slow Aire
  • Henry Purcell (1659-1695), Orpheus Britannicus : Dear, pretty youth – I see she flies me
  • Henry Purcell (1659-1695), Distressed Innocence
  • Daniel Purcell (1664-1717), My dearest, my fairest
  • Sophie Daneman, soprano
  • Paul Agnew, ténor
  • Jeffrey Girton / Liv Heym, violons
  • Lucia Peralta, alto
  • Magali Boyer, violoncelle
  • Sébastien Marq, flûte à bec
  • Thomas Dunford, luth
  • William Christie, clavecin
6 – Promenades musicales : L’Odyssée baroque, extraits

Saluts des terrasses

Comme d’habitude, c’est devant la terrasse que nous terminons tous l’après-midi pour des extraits du spectacle du soir. Bien sûr, cela pourrait faire un peu redite mais finalement, on apprécie la différence d’ambiance. Ici nous sommes tous assis dans l’herbe (enfin sauf les innombrables personnes ayant apporté une chaise pliante…), au soleil… l’ambiance reste détendue. Tous les artistes de la soirée sont présents : le chœur en bas des escaliers, l’orchestre sur la terrasse, les chanteurs qui arrivent sur les promontoires… et les deux chefs qui alternent à la direction ! La mise en bouche dus soir est très agréable avec un petit peu d’italien, de l’anglais et du français. Le Haendel montre une Rachel Redmond lumineuse de timbre, le Purcell un Cyril Auvity aussi à l’aise en anglais qu’en français… et enfin des Sauvages vigoureux ! La proximité des artistes et la décontraction de tous termine de belle manière cette après-midi. Et comment résister à Marie-Ange Petit aux percussions que William Christie fait descendre au milieu des spectateurs durant son solo de tambour !

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, Les Terrasses
  • 30 août 2019, 18h45
  • L’Odyssée baroque, extraits
  • Georg Friedrich Haendel (1685-179), L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato : « O let merry bells ring round »
  • Henry Purcell (1659-1695), King Arthur : Passacaglia
  • Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Indes Galantes – Les Sauvages : « Forêts paisibles »
  • Élodie Fonnard, soprano
  • Rachel Redmond, soprano
  • Anna Reinhold, mezzo-soprano
  • Cyril Auvity, ténor
  • Lisandro Abadie, basse
  • Musiciens de Arts Florissants et élèves de la Julliard School
  • Paul Agnew, direction
  • William Christie, direction
7 – Le Concert du Soir : Odyssée Baroque

Le Concert du Soir

Après une petite promenade dans les jardins, le temps de se reposer et manger un petit peu, voici le plat de résistance : le concert du soir sur le Miroir d’Eau. Dès l’arrivée, on sent bien que l’atmosphère n’est pas exactement comme d’habitude. Les caméras, la régie, les ampoules sur la scène, les bougies flottant derrière cette dernière… La mise en scène semble plus soignée qu’à l’habitude. Et on sentira aussi William Christie plus tendu, allant même jusqu’à demander des applaudissements après la première pièce (lui qui d’habitude semble agacé si l’on applaudit trop !). Mais nous avons là le premier concert de cette Odyssée Baroque qui célèbre les 40 ans de l’ensemble et la tension est sans doute importante et l’enjeu aussi si le but est de produire un DVD.

La Pinède

La première partie s’ouvre sur quelques extraits de Haendel. Dans la lumière du soleil couchant, on est comme hypnotisé par les deux premiers extraits majestueusement rendus par les musiciens. Mais c’est l’air qui suivra qui va vraiment donner le signal du départ de la soirée. Anna Reinhold vient nous chanter un « Scherza infida » d’une beauté troublante. La voix de la mezzo-soprano n’a pas forcément les couleurs des plus grandes, mais elle trouve des accents et une simplicité qui sont désarmants. Le public ne s’y trompe pas et écoute attentivement ce grand moment d’émotions. Le temps semble s’être arrêté. L’ovation qui suivra sera totalement justifiée ! Ensuite, c’est une ambiance plus festive qui arrive avec un duo d’Ariodante où la mezzo est rejointe par Rachel Redmond. Duo d’amour à la délicatesse superbe, à la virtuosité discrète mais parfaitement exécutée. Enfin, déjà entendu aux Terrasses, voici l’extrait de L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato beaucoup plus joyeux et lumineux pour terminer cette partie consacrée à Haendel. Car si l’on associe souvent les Arts Florissants au baroque français voir à Monteverdi, il ne faut pas oublier toutes les productions de Haendel qu’ils ont données… les quelques extraits rassemblés ici sont les souvenirs de ces prestations où brilla et brille toujours des musiciens accomplis sous la main d’un chef très attentif et qui sait toujours éviter la démonstration pour favoriser l’émotion.

Le Mur des Cyclopes

Les choses sérieuses commencent pourrait-on dire avec la première partie française. Bien sûr impossible de ne pas proposer un extrait des Arts Florissants, pièce de Charpentier dont l’ensemble tire son nom. Dommage de ne pas pouvoir nous donner le premier ensemble où chaque art d*se dévoile car c’est sans doute le passage le plus impressionnant de l’ouvrage. Mais nous avons tout de même un superbe air par Élodie Fonnard dont on peut admirer la diction et la finesse d’interprétation. Si le chant pourrait paraître un peu rigide, il est tout de même très nuancé pour cette allégorie. Suit un superbe chœur, montrant bien sûr toutes les qualités du chœur maison. Enfin voici Lully. Il faut avouer une petite frustration dans la scène du Sommeil d’Atys. Déjà, cette version est très étrange, chantée tout le temps en trop, à la manière du trio de Parques d’Hyppolite et Aricie de Rameau. On perd ici les entrées successives, les tuilages progressifs de chanteurs. Et puis pourquoi ne pas avoir proposé toute la scène du sommeil ? Nous n’avons ici que la partie chantée par les solistes sans l’apparition des rêves heureux ou malheureux. On saluera tout de même les trois chanteurs parmi lesquels Cyril Auvity qui rayonne comme toujours dans ce répertoire. Et puis chacun revoit les magnifiques images de la production de Villegier bien sûr ! Pour terminer cette première partie, voici donc la passacaille d’Armide. Quel bonheur que cette musique splendide ! Là encore on aurait espéré qu’elle ne s’arrête pas tant ce passage est splendide. L’écouter dehors, sous un ciel étoilé dans une atmosphère digne des jardins enchantés d’Armide : que faire de mieux ? Surtout quand nous avons un Cyril Auvity toujours au même niveau d’excellence dans son air.

La Cour d’Honneur

Le début de la seconde partie est consacré à Purcell… et la baguette change de main puisque Paul Agnew sera le maître pour cette fois. Il nous donne une lecture très légère et pleine de poésie aux différentes pièces, avec entre autre l’écho superbe. Bien sûr, des chanteurs sont aussi de la partie. On retrouve la magnifique Rachel Redmond mais aussi Cyril Auvity. Les deux sont splendides et l’on a une vision totalement irréelle dans ce jardin où la nuit est tombé. Nous sommes chez la Reine Maab ici, avec toutes ces lumières magnifiques, cette musique féerique… on est totalement transportés !

Le Pont Chinois

Pour conclure cette grande soirée, c’est Rameau qui sera à l’honneur sous la direction de William Christie. Les Fêtes d’Hébé nous donnent une belle introduction en hommage à la musique avec une Élodie Fonnard toujours superbe. Puis voici Les Incas du Pérou, l’entrée des Indes Galantes presque dans son intégralité avec toujours Élodie Fonnard dans le rôle de Phani, Cyril Auvity en Don Carlos et Lisandro Abadie pour Huascar. Les trois chanteurs vont habiter leurs rôles. On soulignera encore une fois l’aisance de la soprano qui se montre totalement à la hauteur de ce rôle qui est peut-être l’un des plus tragiques de l’ouvrage. Bien sûr, Cyril Auvity est un modèle de diction et de nuances… et la grande surprise vient de Lisandro Abadie qui campe un Huascar de très haute tenue avec un beau charisme alors qu’il était pourtant souvent plus timide sur scène dans d’autres productions. Nous avons ainsi trois spécialistes… mais aussi un orchestre très beau et coloré pour nous donner entre autre un tremblement de terre très réaliste, mais aussi des accompagnements lents. La production marquantes de l’Opéra Garnier est ici revenue en mémoire de bien des spectateurs. Enfin, ce sera bien sûr le grand moment des Sauvages… déjà entendue l’après-midi, elle est toujours aussi belle, mais l’acoustique semble ne pas favoriser l’explosivité de cette musique ce qui donne un orchestre un peu terne.

La potager fleuri

Après bien sûr des ovations, deux bis arrivent. Tout d’abord la fameux quatuor de l’entrée des Fleurs des Indes Galantes… et comme William Christie aime à le faire, c’est au chœur qu’il offre ce moment magique. Les solistes viennent d’ailleurs le renforcer et nous offrir un moment de pure beauté. Tout y est calme et limpide, les lignes se croisent et se mêlent. Quel bonheur… Puis arrive la chaconne qui conclue les Indes Galantes… plus martiale avec ses trompettes… et brusquement, des détonations retentissent et au fond de la pièce d’eau débute une grand feu d’artifice tout en blanc, qui éclaire les jardins. Durant tout ce temps ou presque, l’orchestre joue. Mais le bruit du feu d’artifice masque totalement ou presque l’orchestre. Mais quel final magique !

Feu d’artifice

  • Thiré
  • Les Jardins de William Christie, Le Miroir d’Eau
  • 30 août 2019, 20h30
  • Odyssée Baroque
  • Georg Friedrich Haendel (1685-1759), Atalanta, Acte III.7 : Sinfonia
  • Georg Friedrich Haendel (1685-1759), Zadok the priest : Hymne de couronnement
  • Georg Friedrich Haendel (1685-1759), Ariodante, Acte II.3 : « Scherza infida » (Anna Reinhold)
  • Georg Friedrich Haendel (1685-1759), Ariodante, Acte III.12 : « Bramo aver mille vite » (Rachel Redmond, Anna Reinhold)
  • Georg Friedrich Haendel (1685-1759), L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato : « O let the merry bells ring round » (Rachel Redmond)
  • Marc-Antoine Charpentier (1643-1704), Les Arts Florissants : « Que mes divins concerts » (Élodie Fonnard) – « Amour du ciel et de la terre »
  • Jean-Baptiste Lully (1632-1687), Atys : Prélude – « Dormons, dormons tous » (Cyril Auvity, Lisandro Abadie, Jonathan Spicher) – Prélude da capo
  • Jean-Baptiste Lully (1632-1687), Armide : Passacaille (Cyril Auvity)
  • Henry Purcell (1659-1695), The Fairy Queen : Prélude de l’Acte II, « Come all, come all y songsters » (Rachel Redmond) – Prélude – « May the God of Wit inspire » (Rachel Redmond, Cyril Auvity, Lisandro Abadie) – Echo – « Now join your warbling voices » – « Sing while we trip it » (Rachel Redmond) – Danse des fées
  • Henry Purcell (1659-1695), King Arthur : Passacaglia (Cyril Auvity)
  • Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Fêtes d’Hébé – La Musique : « Pour rendre à mon hymen tout l’Olympe propice… Tu chantais » (Élodie Fonnard)
  • Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Indes Galantes – Les Incas du Pérou (Élodie Fonnard, Cyril Auvity, Lisandro Abadie)
  • Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Indes Galantes – Les Sauvages : « Forêts paisibles » (Élodie Fonnard, Lisandro Abadie)
  • BIS – Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Indes Galantes – Les Fleurs : « Tendre amour » (version pour chÅ“ur)
  • BIS – Jean-Philippe Rameau (1683-1764), Les Indes Galantes – Les Sauvages : Chaconne
  • Élodie Fonnard, soprano
  • Rachel Redmond, soprano
  • Anna Reinhold, mezzo-soprano
  • Cyril Auvity, ténor
  • Jonathan Spicher, ténor
  • Lisandro Abadie, basse
  • Musiciens de Arts Florissants et élèves de la Julliard School
  • Paul Agnew, direction
  • William Christie, direction
8 – Méditations à l’Aube de la Nuit : Te Deum de Charpentier

Eglise de Thiré, Les Méditations

Place maintenant au dernier concert de la journée… mais pour cela, il faut aller à l’église de Thiré. Chemin faisant, on remarque un vélo qui double tout le monde… et l’on comprend que ce n’est autre que Paul Agnew qui venait de saluer sur le Miroir d’Eau. Et là, on comprend que toute sa soirée n’a été qu’une alternance entre le jardin et l’église ! Il dirigea un concert à l’église à 20h… une fois ce concert terminé, il est venu diriger la partie consacrée à Purcell dans les jardins, puis est retourné à l’église pour la première Méditation de la soirée, est revenu aux jardins saluer avant de revenir enfin à l’église pour notre Méditation. Quelle soirée !! Et quelle énergie !

À l’entrée des jardins en début d’après-midi, il était indiqué que le concert des Méditations à l’Aube de la Nuit serait rien de moins que le Te Deum de Charpentier ! Mais comment donner cet ouvrage si immense dans l’église de Thiré… et comment font les instrumentistes et le chœur ? Beaucoup de questions qui seront résolues par Paul Agnew lors de sa présentation : c’est un autre Te Deum de Marc-Antoine Charpentier qui sera proposé ! Pour une petite formation. Se mêlent instrumentistes des Arts Florissants et élèves de la Juliard School. Les huit chanteurs sont extraits du chœur et l’on se rend compte en les entendant du niveau miraculeux de ces chanteurs qui sont presque toujours entendus en ensemble. Ici nous avons des solistes de très haute tenue, avec des techniques parfaitement adaptées et une musicalité merveilleuse. Ce Te Deum n’est peut-être pas le plus propice aux méditations, mais en tout cas il couronne magistralement la journée et comme l’indique Paul Agnew, le In Te Domine triomphale qui termine la pièce doit être entendue comme la célébration de ces quarante ans des Arts Florissants. Si l’église est un peu petite pour cette œuvre malgré les effectifs réduits, elle est tout de même une découverte majeure tant on y entend quelque chose de plus fin et délicat que le Te Deum si connu de Charpentier (splendide aussi!). Et le choix de Paul Agnew de limiter le plus possibles les interprètes la rend encore plus belle et simple, permettant d’entendre toutes les réponses entre les différentes parties. La symétrie de la disposition des musiciens et chanteurs permet des effets de spatialisation qui transportent l’auditeur !

La musique s’arrête, l’écho laisse planer les dernières notes… et tout le monde quitte son banc dans le silence, heureux de la journée passée hors du temps et baignée de musique. Malgré les petits reproches adressés, ces journées chez William Christie sont toujours aussi magiques et passionnantes. Entre les découvertes, les jardins, les musiciens de haut niveau… et ces musiques choisies avec amour et passion… un vrai rêve !

  • Thiré
  • Église de Thiré
  • 30 août 2019, 23h
  • Méditations à l’Aube de la Nuit, Te Deum
  • Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) : Te Deum à 8 voix avec flûtes et violons H.145
  • Cécile Granger / Virginie Thomas, sopranos
  • Marcio Soares Holanda / Jonathan Spicher, haute-contres
  • Thibaut Lenearts / Jean-Yves Ravoux, ténors
  • Anicet Caster / Christophe Gautier, basses
  • Liv Heym / Chloe Kim (élève de la Julliard School), violons 1
  • Jeff Girton / Chiara Fasani Stauffer (élève de la Julliard School), violons 2
  • Galina Zinchenko / Rachell Wong (élève de la Julliard School), altos
  • Serge Saitta / Bethanne Walker (élève de la Julliard School), violoncelles
  • Thomas Dunford, luth
  • Marie Van Rhijn, orgue
  • Paul Agnew, direction

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