Lors de la parution du programme de la Philharmonie, ce concert était pour moi l’un des plus précieux… car déjà la distribution proposait parmi ce qui se fait de mieux dans le jeune chant français, mais en plus, on sait l’amour de Marc Minkowski pour l’opéra français et sa curiosité pour les Å“uvres rares ou peu montées. On pouvait donc espérer une soirée grandiose. A l’annonce du programme de la soirée, le bonheur a été complet puisqu’on nous donnait à entendre un florilège varié, passionnant et superbe sur le papier… Et le concert aura tenu toutes ses espérances avec un chef, des musiciens et des chanteurs qui semblaient véritablement heureux de donner vie à tout ce patrimoine parfois endormi.
Minkowski et les Musiciens du Louvre dans l’opéra romantique français est un gage de qualité… En effet ces dernières années, ils nous ont régalés avec de splendides Contes d’Hoffmann à Pleyel ou un Vaisseau Fantôme de Dietsch à Versailles. Si l’on ajoute les superbes direction de Minkowski dans Roméo et Juliette de Gounod ou Les Huguenots, on est certain d’avoir un orchestre vivant, alerte mais pas pressé… en bref tout pour donner tout le relief possible à une musique trop souvent taxé de simplicité voir de pompiérisme. Et tout au long de la soirée, avec une énergie mais aussi une sobriété bienvenue, l’orchestre va créer une ambiance, accompagner les chanteurs, briller dans les passages les plus virtuoses… en bref nous régaler!
Les cinq chanteurs réunis sur le programme sont très en vue actuellement et triomphent sur beaucoup de scènes de belles envergures. Julie Fuchs possède un joli timbre léger et fruité ainsi qu’une belle personnalité pour incarner avec humour certains personnages. Peut-être lui manque-t-il une implication plus forte dans la partie vocale, avec une prise de risque ou au moins de parti-pris plus marqués, mais tout au long de la soirée sa prestation est parfaite. Il faut dire aussi qu’elle pâlit légèrement face à ses collègues! En effet dès son entrée Marianne Crebassa crève l’écran avec une présence immédiate, un timbre personnel et splendide… et une technique impressionnante sur toute l’étendue de la tessiture. Sonore, piquante, recueillie… elle est tout à la fois! Le ténor Stanislas de Barbeyrac possède tout pour être un grand ténor français : le style forgé à l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Paris (comme Crebassa et Sempey!) est sûr, le timbre agréable, le français parfait… aussi à l’aise dans l’élégiaque que dans l’héroïque, il semble taillé pour les rôles de demi-caractère qui ne sauraient tarder dans sa carrière espérons-le! Florian Sempey possède son fan club… il faut dire que la voix est séduisante, l’acteur vif… mais à force de rondeur vocale, l’expression se trouve affaiblie je trouve. Maintenant, il faudrait être difficile pour ne pas saluer là aussi un chanteur très prometteur! Enfin Nicolas Courjal… habitué aux petits rôles mais faisant toujours très grande impression. La voix est noire, sombre, presque sèche et ne peut manquer de faire penser à des Jacques Mars ou Xavier Depraz dans le style ce qui n’est pas un mince compliment. Et quelle personnalité scénique aussi! Il impressionne dès son entrée et les nuances vocales donnent encore plus de force à ses caractérisations. Immense basse qu’on espère dans de grands rôles français prochainement!
Le choix des airs réunis ici a été fait de belle manière puisqu’il nous donne à entendre des Å“uvres extrêmement rares et d’autres très connues. Ainsi, tout le monde a entendu les duos des Pêcheurs de Perles et de Lakmé, ou l’extrait de Manon… mais après, on commence à voir des pièces plus rares en concert comme les Meyerbeer voir même des très grandes raretés comme Pierre de Médicis. Le style des Å“uvres est assez varié, depuis l’opéra classique de Gluck et Méhul jusqu’à la légèreté d’Orphée aux Enfers en passant par beaucoup de nuances de grand opéra et d’opéra-comique. Témoignages de toute une période où l’Opéra de Paris était la scène la plus prestigieuse, tous ces extraits sont passionnants. Les vraies raretés sont donc le Vaisseau Fantôme de Dietsch, l’ouverture de Raymond de Thomas et bien sûr le Pierre de Médicis de Poniatowski. Dans les trois cas, ce sont des Å“uvres du style grand opéra. Le Dietsch est maintenant connu par l’intégrale chez Naïve, mais pour le Thomas, il semble bien que cette ouverture ne soit la seule partie de l’ouvrage qui subsiste. Le style annonce plus une Å“uvre comme Hamlet que Mignon par les couleurs noires du début même si la suite se montre plus bruyante que vraiment inspirée. Par contre, l’extrait de Pierre de Médicis donne vraiment envie d’entendre l’œuvre en entier, d’autant que les critiques de l’époque (même Berlioz!) sont très positifs. L’extrait nous annonce une Å“uvre française avec des inspirations italianisantes comme la cabalette finale. Beaucoup de force avec des effectifs impressionnants (grand orgue, cloche, chÅ“ur…) mais qui ne semblent pas vains car on retrouve pas mal aussi de traits assez originaux et marquants.
Voilà donc pour une petite présentation rapide… mais un tel concert mérite un développement bien sûr! Et donc, voici les détails des airs chantés!
Le concert s’ouvre avec le salut d’Urbain dans Les Huguenots… et c’est une Marianne Crebassa en costume masculin qui s’avance, déjà prête à donner vie au page mutin. Et dès les premières notes, on est pris par ce timbre chaud et presque androgyne par certains moments. Julia Lezhneva était magnifique à Bruxelles, mais Crebassa ne l’est pas moins : immédiatement on croit à cet adolescent et le chant vif, piquant, magnifiquement orné et projeté. Du grave à l’aigu la voix se déploie, se réduit, explose… une démonstration de chant et de personnalité pour une ouverture en triomphe de la soirée! L’orchestre suit en bondissant le jeune page de belle manière.
Avec un extrait d’Iphigénie en Tauride de Gluck, Stanislas de Barbeyrac nous amène vers les débuts du répertoire romantique, et même vers le répertoire classique. Dans cet air calme, le ténor se montre admirable de ligne et de nuances, présageant un superbe Admète pour Alceste. Si l’orchestre sonne un peu large pour du Gluck, la voix de Barbeyrac semble parfaitement calibrée pour, avec ce qu’il faut de métal pour passer sans soucis tout en conservant une douceur agréable. Un moment de grâce…
Après l’intégrale parue chez Naïve, voici donc un extrait du Vaisseau Fantôme de Dietsch… ce duo où s’affichent l’amour de Troïl et la droiture de Minna. En distribuant Julie Fuchs et Florian Sempey, on découvre le duo sous un jour nouveau… en effet, avec sa voix légère Julie Fuchs donne beaucoup de fraîcheur au personnage alors que le Troïl de Sempey gagne en jeunesse… mais du coup, on perd aussi ces deux volontés : elle reste la jeune fille loin du conflit de son cÅ“ur et lui n’a pas cette étrangeté sombre qui sied au personnage. Du coup on assiste certes à un beau duo, mais sans le frémissement qui pouvaient donner Sally Mathews et Russel Braun.
Puis arrive Robert le Diable… et on replonge avec délice dans Meyerbeer! Dès l’introduction, l’orchestre se montre très sombre, lent et lourd. La présence de Bertram se fait sentir avant qu’il n’ouvre la bouche et l’on voit Nicolas Courjal entrer sur scène derrière l’orchestre, le surplombant de sa grande silhouette sombre. Dès qu’il ouvre la bouche, le diable est là , vivant et méchant, mais aussi joueur et noble. La voix tonne ou susurre, les accents sont particulièrement nuancé. Loin d’une démonstration jubilatoire comme nous la propose Ramey, Courjal et Minkowski choisissent une longue déclamation profonde et sinistre. A ce titre, pas d’aigu triomphal mais une cadence descendant bien bas (do?) et saisissante d’impact. Magistral moment, qui est prolongé par la procession des Nonnes tout aussi grandiose avec ces sonorités étouffées. Les textures rendues par l’orchestre sont totalement glaçantes et révèlent une page des fois prise avec trop d’allant finalement. Les quelques phrases de Bertram permettent à Nicolas Courjal de nous refaire frémir quelques mesures de plus!
Toujours Robert pour un air d’Isabelle dévolu à Julie Fuchs. Si elle avait été assez terne dans le duo précédent, elle trouve ici de quoi briller. La voix sonne étrangement bien avec un impact qui était absent avant. Son Isabelle est frémissante et belle. L’orchestre l’accompagne avec ardeur et beauté pour la harpe, alors que Minkowski soigne le volume afin d’éviter les emportements sur les dernières phrases. La soprano trouve ici de quoi se montrer telle qu’on entend parler d’elle : un beau timbre, une belle ampleur… et un beau phrasé qui lui permet de se couleur dans les grandes mélodies lyriques composées par Meyerbeer.
On quitte cette atmosphère oppressante (Dietsch et Meyerbeer) pour l’ouverture de Raymond ou Le Secret de la Reine d’Ambroise Thomas. La pièce est vivante, pleine d’énergie… et le contraste est bienvenu avec les airs précédents. Minkowski dirige avec toujours autant d’énergie et l’orchestre est dans son élément : il donne à la fois une belle rondeur mais sans pour autant alourdir le propos. On retrouve la qualité de Cendrillon ou des Contes d’Hoffmann dans cet équilibre. Et puis la pièce en elle-même est fort sympathique comme pièce de concert. Si l’Å“uvre est du même niveau, il serait intéressant de pouvoir l’entendre un jour dans son entièreté!
Retour dans du très connu pour le duo entre Nadir et Zurga dans Les Pêcheurs de Perles. Chose étrange, c’est la version remaniée du duo qui nous est proposée, avec reprise du « Oui c’est elle, c’est la déesse » et non le serment « Amitié sainte »… Mais nous sommes en récital et il faut bien avouer que d’un point de vue purement mélodique, la version originale n’est pas la plus passionnante. Stanislas de Barbeyrac et Julien Sempey se trouvent très à l’aise dans ce duo, véritablement frère là où souvent un décalage d’âge se fait sentir. Sempey ouvre superbement le duo avec un récitatif sobre et bien mené, alors que la délicatesse de Barbeyrac fait merveille dans les moments suspendus. Un beau moment de chant et de complicité en tout cas!
Retour diabolique pour Nicolas Courjal dans La Damnation de Faust de Berlioz… la sérénade de Méphistofélès le trouve particulièrement à son aise, manipulateur parfait, joueur invétéré. Le texte claque, les nuances surprennent… tout est là pour cette sérénade souvent rabâchée mais ici totalement habitée et vécue… tellement vécue même que Courjal s’emporte et oblige l’orchestre à courir pour le rattraper sur quelques mesures! L’orchestre justement se fait vif et détaillé, osant des sonorités étranges mais très bienvenues. Ce diable est vraiment très impressionnant et charismatique!
Enfin pour clore cette grande première partie, le duo des fleurs de Lakmé renouvelle la beauté du duo des Pêcheurs. Julie Fuchs et Marianne Crebassa marient leur voit si dissemblable pour une belle fusion, entre la légèreté de la soprano et le bronze de la mezzo. Passage obligé des récitals avec un soprano léger et une mezzo, ce duo est ici très touchant et recueilli… les deux chanteuses se répondent et se regardent, comme isolées du monde pour justement créer le jardin où se promènent Lakmé et Malika. Conclusion en douceur et délicatesse donc d’une partie très chargée et passionnante en tous points!
Retour en fanfare pour la deuxième partie, avec un extrait de Pierre de Médicis de Joseph Poniatowski. Å’uvre recréée en 2011 à Cracovie (déjà avec Florian Sempey), on découvre une partition assez intéressante, pleine d’effet mais pas sans force dramatique! Déjà l’entrée de l’air se fait sur un solo d’orgue qui nous permet d’entendre le son de l’orgue de la Philharmonie… puis un air en deux parties assez traditionnel se terminant par une cabalette. Si la salle n’aide pas Florian Sempey à être toujours bien compréhensible, il faut tout de même louer l’investissement du chanteur qui se lance dans ce grand moment de bravoure avec fougue et réussite… Quelques fois noyés dans la masse de l’orchestre, il en ressort presque toujours triomphateur par un aigu puissant et vainqueur. L’air donne en tout cas fortement envie de découvrir la partition dans son intégralité : les effets sont variés, le récitatif bien conduit. Il se dégage une belle noblesse et une certaine force.
Stanislas de Barbeyrac nous revient encore avec une Å“uvre à la limite du romantisme puisque c’est dans Joseph de Méhul qui nous l’entendons. Cet air de Joseph est l’un des rares morceaux du compositeur à être régulièrement donné. Préfigurant le grand opéra, il propose à la fois la démesure de ce dernier dans une dernière partie plus enlevée et héroïque, mais aussi une déclamation toute classique. Particulièrement à l’aise dans cet entre-deux, le ténor ravit pour un air qui a pourtant été illustré par des grands noms du passé de fort belle manière. Mais quand justement on a cette manière, ce style sobre et clair… il est difficile de ne pas faire mouche dans cet air.
Seule Å“uvre de Massenet au programme, l’air de Manon permet à Julie Fuchs de se montrer sous un jour plus léger que dans la première partie. Dès son entrée, on sent la chanteuse prête à jouer la jeune fille, se promenant sur la scène, chantant vers l’arrière scène… et jouant avec le public qui, comme à chaque fois avec cet air, applaudit alors que l’air n’est pas terminé! Beaucoup d’aisance, une belle délicatesse et ce petit piquant nécessaire à Manon… un superbe allègement de la tension bienvenu qui de plus permet à la soprano de se montrer virtuose là où ses autres apparitions demandaient d’autres qualités.
Mais le grave revient avec le monologue de Philippe II extrait du Don Carlos de Verdi. Déjà , quel bonheur d’entendre cet air en français… et quand il est en plus interprété comme cela, avec autant de clarté dans l’exécution et la diction, on ne peut que rendre les armes! Dès les premières notes, Minkowski impose une vision très noire avec ces trois traits sombres. Puis arrive le solo de violoncelle magnifique. Joëlle Martinez ne s’alanguit pas dans ce solo, évite les étirements trop importants mais donne une belle rondeur et une humanité déchirante. Beau vibrato expressif qui nous montre toute la tristesse du roi… puis arrive Nicolas Courjal qui s’impose immédiatement par son charisme vocal. Ce roi n’est ni particulièrement blessé ou noir, il est juste humain et loin de la vieillesse qu’on entend chez certains : homme encore jeune mais poids du destin et noblesse imposante. Plein de sobriété, d’intériorité, rebelle à son désespoir, ce Philippe II touche au cÅ“ur non pas par la faille que trouve certains mais par cette incompréhension de son propre malheur.
Si Urbain convenait comme un gant à Marianne Crebassa, le Nicklause des Contes d’Hoffmann semble moins naturel. Cet archet frémissant justement manque de frémissement, tout y est presque trop lisse et poli. La voix est superbe et le chant aussi mais cela manque un peu de nuances et de détails pour vraiment emporter. Est-ce l’écoute trop répétée de Michèle Losier avec le même Minkowski qui fait passer cette interprétation pour un peu trop massive? Peut-être et sûrement car le timbre, les nuances… tout est là … mais la voix me semble trop opulente.
Le duo d’Orphée aux Enfers fait toujours son petit effet, et on peut compter sur l’aisance scénique de Julie Fuchs et Florian Sempey pour donner vie à cette petite farce. Et dès l’entrée de Jupiter, le ton est donné puisque Sempey joue et s’amuse, entrainant Julie Fuchs. Vocalement les deux se coordonnent très bien et nous gratifient de superbes bourdonnements. Humour et plaisir évident de chanter!
Le Voyage dans la Lune du même Offenbach est bien moins connu. Et Marc Minkowski nous en propose le Ballet des Flocons de Neige. Poétique et délicat dans l’introduction, le climat s’échauffe au fur et à mesure pour passer à une polka puis un galop! Les Musiciens du Louvre peuvent donc s’en donner à cÅ“ur joie et semblent même retrouver le rythme de la Chauve-Souris donnée à l’Opéra-Comique il y a peu de temps : énormément d’énergie pour ce crescendo dirigé de main de maître par Minkowski.
Clôture du programme par un air connu et admiré, celui de Marie de Gonzague de Cinq-Mars de Gounod. Tout comme Massenet, un seul air… mais celui-ci est rare. Forcément, après l’avoir entendu dans son contexte à Versailles il y a quelques semaines, l’écoute est différente. Mais Marianne Crebassa n’a pas à rougir de la comparaison avec sa collègue Véronique Gens. Si elles partagent une tessiture, elles n’ont pas du tout la même personnalité vocale. Là où Gens était une grande princesse, Crebassa est avant tout une jeune femme amoureuse beaucoup plus fragile. La voix se déploie et montre toute sa féminité, caressant les grandes courbes composées par Gounod sans jamais forcer. On termine donc sur un moment de délicatesse…
Malgré l’heure tardive (23h passé alors que le concert devait se terminer à 22h45!), Marc Minkowski nous annonce que « bien sûr », il y a des Bis! Mais que faire après tous ces airs et duos? Trouver un ensemble pour tous les chanteurs? Difficile… Alors Marc Minkowski nous propose plutôt une surprise. La grande Ewa Podles vient participer à ce gala en reprenant l’un de ses triomphes de ses dernières années : Madame de la Haltière extrait de Cendrillon de Massenet! Introduite par les deux filles et Pandolfe (Julie Fuchs, Marianne Crebassa et Florian Sempey), le décor est posé et la grande Podles peut se lancer dans son grand numéro. Car plus que juste chanter, elle joue son personnage en osant tout tant vocalement que scéniquement. Et même si la voix n’est plus aussi sonore, si la diction est loin d’être parfaite… l’art brille et la chanteuse s’impose immédiatement pour ce personnage hors norme. Drôle, impressionnant et juste, la prestation est saluée par un tonner d’applaudissements. Cette apparition sonne comme un hommage à une grande dame de la part du chef bien sûr, mais aussi des jeunes chanteurs qui semblent bien impressionnés !
Forcément, un deuxième bis avec un extrait de l’opérette Les Aventures du Roi Pausole d’Arthur Honegger. Un trio léger où Julie Fuchs hésite entre la jeune danseuse travestie en homme (Marianne Crebassa), et le jeune page travesti en fermière (Stanislas de Barbeyrac). Léger, agréable à l’écoute surtout joué et chanté comme cela, ce charmant bis pourrait clore la soirée… mais en dernier cadeau, le galop d’Orphée aux Enfers où tous les chanteurs reviennent pour le chÅ“ur. Devant l’enthousiasme de Minkowski et son orchestre, les pauvres chanteurs se trouvent vite dépassés mais qu’importe car ils sont heureux, jouent, dansent… et le public en redemande. Mais il est 23h30… il est temps de revenir au monde réel!
Mené de très belle manière par Marc Minkowski, ce gala aura été un vrai moment de bonheur musical et lyrique! Le répertoire évoqué alternait les grands standards à des pièces très rares, les chanteurs étaient tous de très haut niveau, l’orchestre et le chef parfaits… et même l’ambiance était au beau fixe! Les chanteurs venaient chanter leur partie, saluaient… et il fallait parfois que ce soit Minkowski qui aille les chercher en coulisse pour qu’ils reviennent saluer. Chacun avait un petit signe pour l’autre lors des croisements… et le chef évitait aussi les entrées/sorties inutiles en laissant peu de temps entre chaque air. Le but semble vraiment d’être tout d’abord de servir la musique, de proposer des pièces marquantes de l’opéra français. Il n’y a pas ou peu d’ego dans cette soirée, juste un plaisir évident. Si la salle n’était pas pleine, chacun aura sans doute passé une merveilleuse soirée. En tout cas, le sourire était sur tous les visages à la sortie de la salle et c’était la preuve de la belle réussite de ce concert.
Il est à espérer que ce genre d’initiative sera répétée dans l’avenir, car à un tel niveau d’excellence (malgré les petites réserves exprimées, on reste dans le très haut niveau pour tous!) cela montre entre autres que tout ce répertoire possède de vraies beautés et qu’il mérite d’être monté en lui donnant sa chance : avec des artistes au niveau et un vrai amour de la partition.
Des micros sur scène peuvent faire espérer une captation, voir même une anthologie au disque… mais ne rêvons pas trop tout de même…
- Paris
- Grande Salle de la Philharmonie de Paris
- 19 février 2015
- Giacomo Meyerbeer (1791-1864), Les Huguenots : Nobles seigneurs, salut (Urbain 2)
- Christoph Willibald Gluck (1714-1787), Iphigénie en Tauride : Quel langage accablant… Unis dès la plus tendre enfance (Pylade 3)
- Pierre-Louis Dietsch (1808-1865), Le Vaisseau fantôme, Récit, romance et duo : Quel que soit le courroux… Par les vents promenés (Troïl 4, Minna 1)
- Giacomo Meyerbeer (1791-1864), Robert le Diable : Voici donc les débris… Nonnes, qui reposez (Bertram 5)
- Giacomo Meyerbeer (1791-1864), Robert le Diable, Procession des nonnes
- Giacomo Meyerbeer (1791-1864), Robert le Diable : Robert, toi que j’aime (Isabelle 1)
- Ambroise Thomas (1811-1896), Raymond ou Le Secret de la Reine, Ouverture
- Georges Bizet (1838-1875), Les Pêcheurs de perles : C’est toi, toi qu’enfin je revois !… Au fond du temple saint (Nadir 3, Zurga 4)
- Hector Berlioz (1803-1869), La Damnation de Faust : Maintenant… Devant la maison (Méphistophélès 5)
- Léo Delibes (1836-1891), Lakmé, Duo des fleurs (Lakmé 1, Mallika 2)
- Joseph Poniatowski (1816-1873), Pierre de Médicis : Asile auguste et solitaire… Mère adorée (Julien de Médicis 4)
- Étienne-Nicolas Méhul (1763-1817), Joseph : Vainement Pharaon… Champs paternels (Joseph 3)
- Jules Massenet (1842-1912), Manon, Air du Cours-la-Reine : Suis-je gentille ainsi (Manon 1)
- Giuseppe Verdi (1813-1901), Don Carlos : Elle ne m’aime pas (Philippe II 5)
- Jacques Offenbach (1819-1880), Les Contes d’Hoffmann : Vois sous l’archet frémissant (Nicklausse 2)
- Jacques Offenbach (1819-1880), Orphée aux Enfers, Duo de la mouche (Eurydice 1, Jupiter 4)
- Jacques Offenbach (1819-1880), Le Voyage dans la lune, Ballet des flocons de neige (Introduction, Les Hirondelles bleues, Polka, Galop final)
- Charles Gounod (1818-1893), Cinq-Mars : Par quel trouble… Nuit resplendissante (Marie de Gonzague 2)
- BIS Jules Massenet (1842-1912), Cendrillon : Lorsqu’on a plus de vingt quartiers! (Madame de la Haltière 6, Noémie 1, Dorothée 2, Pandolfe 4)
- BIS Arthur Honegger (1892-1955), Les Aventures du Roi Pausole, Trio du baiser (Aline 1, Le Page déguisé en fermière 3, Mirabelle déguisée en prince 2)
- BIS Jacques Offenbach (1819-1880), Orphée aux Enfers, Galop
- Julie Fuchs, soprano 1
- Marianne Crebassa, mezzo-soprano 2
- Stanislas de Barbeyrac, ténor 3
- Florian Sempey, baryton 4
- Nicolas Courjal, basse 5
- Ewa Podles, contralto surprise 6
- Les Musiciens du Louvre Grenoble
- Marc Minkowski, direction
Merci Polyeucte !
Pour un programme aussi original, la vaste salle était vraiment bien remplie.
Globalement très d’accord.
¶ Une nuance pour moi : je ne suis pas inconditionnel de Julie Fuchs d’ordinaire, moi non plus, mais sa clarté et sa netteté d’articulation m’ont ravi dans ce récital (à commencer par sa Minna)… en revanche dans Manon, elle reprenait ses habitudes, avec un texte moins intelligible, et une voix un peu plus opaque. Sans doute parce qu’elle y a ses habitudes depuis longtemps : j’espère que cela augure d’une évolution de la voix (à rebours de celles d’ordinaire).
Et ce n’est pas qu’une question de largeur : l’air de Robert, en vrai, se pare de couleurs orchestrales extraordinaires très au-dessus de la norme belcantiste, et même Fuchs le chantait avec une belle fermeté !
¶ Deux précisions :
— Courjal a fait cette erreur de rythme (et eu quelques flottements) parce qu’il a manqué son départ, amis surtout parce que cette pièce est en elle-même piégeuse… je ne suis pas sûr qu’il ait chanté le rôle sur scène, et franchement, ça demande du travail sous ses habits de simplicité, justement parce que les repères y sont rares, et que la voix ne tombe pas sur des appuis rythmiques évidents. Ça ne s’entend pas vraiment à l’écoute seule, mais quand on veut le chanter, on s’en aperçoit très vite…
— Sempey était couvert dans le Poniatowski à cause de sa technique, très (trop) couverte, qui lui assure en permanence un volume important, mais bride la voix au bout du compte et ne lui permet pas de faire monter la dynamique quand nécessaire – c’est un peu le problème, on a l’impression qu’il chante tout à la même intensité.
Sinon, fantastique programme, fantastiques interprétations (la séquence Robert était particulièrement intense !).
Ah, pardon, je t’ai appelé par le mauvais pseudo (sens-toi libre de corriger si nécessaire…).
Oui, salle plutôt bien remplie, mais j’imaginais une salle totalement pleine!
Sinon assez d’accord pour Fuchs mais disons que dans Manon elle se montrait plus… le duo du Vaisseau n’a pas été très flamboyante de même que Lakmé… et Robert, ça reste du grand trait là où Manon est plus varié je trouve.
Ok pour Courjal…
Et il l’a chanté. Avec juste Roth à la baguette, Antonacci en Marguerite et Spyres en Faust… Oui, on peut pleurer qu’il n’y ait pas d’enregistrement!
Pour le pseudo, pas de soucis… c’est ça de changer de nom pour chaque lieu!